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lundi 15 février 2016

Urbanisation, intercommunalité et aménagement de l'espace urbain

La nécessité de considérer aujourd'hui l'urbanisation de l'Aquitaine au prisme des unités urbaines ou des aires urbaines conduit également à observer si ces évolutions interfèrent avec la progression de l'intercommunalité et la manière dont cette dernière a pris en compte le rôle des villes

Aires urbaines et intercommunalité


La loi de 1999, dite Chevènement, fixe le rôle des EPCI (Etablissement public de coopération intercommunale) à fiscalité propre en reconnaissant trois niveaux: communauté de communes (CDC), communauté d'agglomération (CA) et communauté urbaine (CU).L'Aquitaine compteune communauté urbaine, huit communautés d'agglomération alors qu'il existe 17 aires urbaines. Une très large majorité des unités d'Aquitaine sont des CDC.


Seule l'agglomération de Bordeaux possède les caractéristiques (au moins 500 000 habitants) permettant d'être une communauté urbaine.La CUB (communauté urbaine de Bordeaux) regroupe 27 communes depuis sa création en 1968. Si on périmètre était adapté à la situation démographique des années 1960, il apparaît aujourd'hui, sans même considérer l'aire urbaine, que les 27 communes ne recouvrent qu'une partie de l'unité urbaine. Aucun changement de périmètre ne semble actuellement possible et cela sera d'autant plus difficile que les communes hors CUB, appartenant à l'unité urbaine, s'opposent souvent avec détermination à toute tentative de modification du périmètre de la CUB en dénonçant l'hégémonisme de la ville-centre. De fait, comme le montre la figure, autour du noyau qu'est la CUB, se sont constituées des communautés de communes jalouses de préserver leur autonomie et leur capacité à offrir des terrains aux entreprises et aux particuliers. Il convient de signaler aussi, que ces communautés de communes qui encerclent la CUB comptent presque toujours moins de 10 communes, que ces regroupements sont fondées plus sur des affinités politiques ou de proximité que sur des projets et qu'enfin leur superficie est plus grande à l'ouest parce que les communes landaises sont très vastes comparé à l'extrême morcellement communal de l'Entre-deux-Mers, par exemple.


Pour devenir une communauté d'agglomération, il faut respecter trois critères:rassembler au moins 50 000 habitants, disposer d'une commune ayant au minimum 15 000 habitants et que la nouvelle entité soit géographiquement d'un seul tenant et sans enclave. Quand on observe la situation en Aquitaine, on constate qu'il n'y a que huit CA., que ces dernières sont presque toujours en inadéquation avec le périmètre de l'unité urbaine. Quelques-unes de ces CA sont d'anciens districts, tels Bayonne et Arcachon. Dans ces deux cas, on s'est contenté de passer du périmètre du district à celui de la communauté d'agglomération. La CA de Bayonne comporte trois communes (Bayonne, Anglet et Biarritz) rassemblent un peu plus de 100 000 personnes quand l'aire urbaine est deux fois plus peuplée. La communauté d'agglomération du Bassin d'Arcachon Sud totalise un peu plus de 50 000 citadins sur quatre communes, Arcachon, La Teste, Gujan-Mestras et Le Teich.


Notons également que la CA de Pau avec ces 14 communes ne coïncide par parfaitement avec l'unité urbaine même si elle compte 150 000 habitants.Situation semblable dans la CA d'Agen qui réunit sept communes seulement et pourtant 62 000 citadins. C'est la situation de l'intercommunalité à Périgueux qui est la plus dommageable pour une meilleure réflexion sur la gestion des territoires urbanisés. En effet, la CA de Périgueux regroupe 13 communes situées à l'ouest, alors que celles de l'est se retrouvent dans une CDC dont toutes les communes appartiennent à l'aire urbaine, dont la plus peuplée, Boulazac, sur laquelle sont installées de nombreuses entreprises industrielles et commerciales, source de recettes fiscales importantes.


Pour toutes les autres CA et celles à venir, il a été ou il sera plus difficile de parvenir à la barre de 50 000 habitants en raison de l'obligation d'incorporer des communes peu peuplées et de connaître le risque de se heurter à la résistance de celles qu'il faudrait inclure dans la périmètre pour qu'il n'y ait pas d'enclave. Si dans ces cas de figure, l'adéquation entre aire de la communauté d'agglomération et l'aire urbaine est proche elle n'est jamais parfaite car comme à Périgueux les oppositions entre élus conduisent à des incohérences.La CA de Mont-de-Marsan a pu être créée en 2002 lorsque l'adhésion de trois communes a permis d'attendre 2007 pour que naisse la CA du Grand Dax en commençant par la réunion de quatre communes dans une CDC (1993), puis la création d'un SIVOM réunissant 20 communes des cantons sud et nord.


Volontaire pour l'apparition d'une CA de Marmande, son maire n'a pu y parvenir, car dans un périmètre très élargi, prenant en compte l'aire urbaine, rendu nécessaire par la nécessité d'atteindre le seul de 50 000 habitants, trois communes s'y sont opposées. L'Etat n'ayant pas tenu compte de leur volonté de nepas être dans le périmètre, elles ont obtenu gain de cause auprès du tribunal administratif, arguant de leur caractéristique rurale alors même qu'elles développent des zones d'activités en bénéficiant de leur proximité par rapport à Marmande  et à Tonneins. Actuellement, le maire de Libourne envisage une CA qui, en raison des oppositions des élus des communes de la partie occidentale du Libournais, devrait se réaliser avec la partie orientale de l'aire urbaine, celle qui est la plus la plus éloignée de Bordeaux. Il a fallu 10 ans de tractation pour que les trois CDC de l'agglomération de Bergerac fusionnent ce qui devrait permettre la naissance d'une CA de 53 000 habitants en 2012.


Face à des constructions intercommunales aussi variées dans les espaces urbains, on imagine sans peine que les approches dans le domaine de la planification urbaine sont peu aisées et différentes selon les grandes zones d'urbanisation. On s'en tient à la seule planification urbaine, mais il conviendrait aussi de regarder comment les EPCI, à partir de leurs compétence, principalement en matière de développement économique et durable, gèrent les espaces urbanisés dont elles sont la charge.


Instauré par les lois SRU de 2000, le schéma de cohérence territoriale (SCoT) est un document d'urbanisme qui détermine, à l'échelle de plusieurs communes ou groupement de commues, l'organisation du territoire, les grandes orientales en matière de politiques publiques (habitat, déplacements, économie). Depuis Grenelle II, ces documents d'urbanisme (ainsi que les PLU) doivent préciser les efforts à réaliser pour réduire la consommation d'espace, les déplacements et assurer un équilibre dans la répartition des activités au sein du territoire concerné.


Plus encore que dans le reste du territoire métropolitain, le morcellement intercommunal observé en Aquitaine est à l'origine d'un retard important dans la mise en place des SCoT et ne permet pas dans plusieurs cas d'opter pour les périmètres les plus pertinents pour la meilleure gestion des espaces urbains.


Espaces urbanises et aménagement du territoire en Aquitaine



La plupart du temps en effet, il a fallu mettre en place des syndicats mixtes à la territorialité plus étendue que les EPCI existantes au sein des aires urbaines, afin de mieux prendre en compte la périurbanisation active sur les franges des agglomérations.


Le retard pris dans l'élaboration des SCoT a peut être permis de déterminer des périmètres qui sont plus en phases avec l'étalement urbain. Périgueux, Marmande, Villenuve-sur-Lot, Mont-de-Marsan, Dax et plus récemment Pau (2010) ont opté pour des SCoT qui couvrent de manière assez parfaite leur aire urbaine. Il en sera probablement de même pour Bergerac, mais le syndicat mixte est en cours de constitution.


Comme on peut aisément l'imaginer, c'est dans les espaces urbains sous influence des trois principales villes de l'Aquitaine que la réflexion sur les périmètres a été la plus complexe. Fallait-il dans les vastes espaces d'urbanisation un ou plusieurs SCoT? L'observation de la situation actuelle (très changeante car des projets de SCoT sont en discussion comme à Libourne, Langon et Bergerac) montre que les élus ont opté pour plusieurs SCoT. Ainsi, alors que les périmètres des SCoT de Oloron-Sainte-Marie et de la région de Lacq ont été arrêtés en 2008, celui de Pau n'a vu le jour qu'en 2010, reste d'ailleurs à confirmer, mais devrait probablement coïncider avec l'aire urbaine de la ville principale du Béarn. Moins vaste, l'aire urbaine de Bayonne est aujourd'hui couverte par trois ou quatre SCoT selon qu'on insère le Grand Dax dans cette dynamique démographique du sud-ouest de l'Aquitaine. Ce choix reflète les découpages intercommunaux et les rivalités entre la partie nord et sud du littoral du Pays basque et les parties landaises de l'agglomération.


Les discussions pour déterminer le périmètre le plus pertinent pour mieux gérer et orienter l'évolution de l'agglomération de Bordeaux ont abouti à la création du Syndicat mixte du schéma directeur de l'aire urbaine bordelaise (Sysdau). Son périmètre qui rassemble un peu moins de 100 communes, dont la communauté urbaine de Bordeaux, ne recouvre qu'une partie de l'aire urbaine de la métropole de l'Aquitaine. De plus, les élus n'ont pas suivi les recommandations des services de l'Etat qui estimaient que le SCoT devait concerner non pas la seule aire urbaine de Bordeaux, mais également celles d'Arcachon et Libourne, ce qui correspond à l'axe de développement urbain de l'agglomération.


Autour de ce SCoT central, on constate que les communes du littoral ont pris de l'avance sur celles de la partie orientale. Si la Pointe du Médoc dispose d'un SCoT opérationnel, il ne concerne pas la totalité du Médoc. Le SCoT des Lacs Médocains, en projet depuis 2008, ne concerne pas toutes les communes entre ces lacs et le SCoT de Bordeaux, de même il ne jouxte pas celui du bassin d'Arcachon. Au moins, ce SCoT du bassin d'Arcachon prend en compte la totalité de cet espace très convoité aux portes de Bordeaux et il s'élargit de plus aux communes situées au sud de l'agglomération. En revanche, ce SCot s'interrompt sur les limites départementales car les oppositions sont fortes, notamment de la part des départements, d'accepter que des découpages administratifs débordent des limites départementales.


De la même manière, le SCot du libournais en phase préparatoire, inclut le secteur de Sainte-Foy-la-Grande, alors que les services de l'INSEE place cet ensemble dans l'aire urbaine de Bergerac. Ici aussi, la limite départementale s'impose dans la détermination des espaces soumis à un document d'urbanisme.


Si, dans cette approche de l'urbanisation, on s'en tient aux documents SCoT en raison de leur lien avec la dimension des aires urbaines, il ne faut pas perdre de vue que d'autres analyses sont à effectuer pour articuler les SCoT aux plans locaux d'urbanisme (PLU), sachant que ces derniers sont majoritairement communaux et que les maires conservent une liberté considérable en matière d'aménagement urbain de telle manière que la gestion de l'étalement urbain reste soumise à des décisions communales.
          

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