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dimanche 2 octobre 2016

Histoire du col de Bussang de la région Lorraine: déclin progressif de la voie commerciale


Lorraine ducale au moment du rattachement à la France au XVIIIe siècle


La guerre de Trente Ans, la guerre de Dix Ans et la guerre de Hollande ont mis fin au commerce international régulier sur la route d'Alsace et de Franche-Comté par le col de Bussang. Les raisons sont multiples, mais la première est géopolitique et la seconde est économique. Après ces guerres, les cols vosgiens deviennent frontières territoriales: pour le col de Bussang avec l'Alsace devenue française en 1648 au traité de Westphalie et pour le col des Croix avec la Franche-Comté devenue française en 1648 au traité de Nimègue. Comme on le voit sur la carte ci contre, Bussang et les Hautes-Vosges restent en Lorraine ducale jusqu'en 1766. Au-delà des dates, ce sont surtout les nombreuses décennies de désordre, de pillage et de guerre qui ont durablement perturbé et désorganisé le pays comme les documents d'archive, le montrent pour l'ensemble du massif vosgien très touché par la guerre de Trente Ans. L'autre facteur expliquant le déclin de la route Lorraine-Alsace-Suisse est d'ordre économique. Les changements géopolitiques perturbent les échanges traditionnels dans l'axe lotharingien car les régions annexées adoptent la législation française, notamment en ce qui concerne les taxes et les impôts. C'est par exemple Louis XIV qui introduit la gabelle en Lorraine pendant l'occupation du duché en 1633. Le rattachement de la Lorraine ne changera d'ailleurs rien aux problèmes car les taxes douanières sur les produits passant de Lorraine en France ont été maintenues. Les débouchés traditionnels des Lorrains au sud-est du massif vosgien ont périclité.

Une lettre de l'empereur Rodolphe II adressée à Eberhardt, seigneur de Ribeaupierre, permet d'avoir la confirmation de l'abandon de la route d'Alsace ancestrale par le col de Bussang. L'empereur fait connaître à son vassal son intention d'établir un bureau de péage à Saint-Marie, "attendu que les marchandises qui entraient en France ou qui venaient du côté d'Epinal, de la Lorraine et de la Bourgogne, passaient autrefois par Bergheim, Thann et Belfort, où elles étaient soumises à un droit de péage, passent maintenant par le val de Lièpvre, où elles ne payent aucun droit de péage". Or la route qui mène à Thann est celle de la vallée de la Moselle qui passe par le col de Bussang et son péage de Taye. La destinée de Thann dépendit de sa position géographique à l'entrée de la vallée de la Thur puisqu'elle "verrouillait l'accès au col de Bussang et occupait une situation de passage entre l'Empire et le royaume de France". Un extrait de l'ouvrage de l'historien local Louis Jouve sur Bussang illustre très bien la nostalgie de l'ancienne route du col de Taye: "sa situation au pied des montagnes des Vosges, loin des grandes villes, devait faire de Bussang un lieu d'arrêt tout indiqué sur la route de Metz à Bâle. Les routiers et les voyageurs de tout ordre y faisaient une halte forcée entre Thann et Remiremont, entre lesquels la distance était beaucoup trop grande pour une seule journée de voyage, vu l'état ancien des routes, presque impraticables dans la première moitié du XVIIIe siècle pour les grands transports comme pour les troupes. L'argent y circula avec plus d'abondance, les relations avec le dehors y devinrent plus actives et plus fréquentes, quand on eut rectifié, amélioré, les routes qui traversaient les montagnes des Vosges. Ah! Les routiers avec leurs voitures de transport énormes, les mallebroucks et accéléré, nous disent les vieux, quel mouvement, quelle animation, quel courant commercial cela produisait à Bussang! Vous n'avez pas idée de cela, vous, les jeunes!".

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