Nombre total de pages vues

vendredi 7 octobre 2016

Histoire du col de Bussang de la région Lorraine: Aux frontières d'Allemagne

Au contact de deux familles de langues vernaculaires, il sépare aussi deux langues littéraires et administratives, le français et l'allemand, et ceci pas uniquement depuis l'annexion de l'Alsace-Lorraine comme Terre d'Empire en 1871 ou le rattachement manu militari de l'Alsace au IIIe Reich en 1940. L'usage des termes "allemand" et "Allemagne" était très fréquent dans le français régional de Lorraine pour désigner tout ce qui n'est pas franco-roman. Donc l'Alsace voisine au franchissement des cols vosgiens est terre d'Allemagne. L'actuelle Moselle germanophone formait autrefois le "bailliage d'Allemagne" au sein du duché de Lorraine. La Tête des Allemands (1 014 m) et le col des Allemands (915 m) au-dessus du col de Bussang au sud font référence à la vocation frontalière culturelle entre le monde germanophone et le monde francophone bien avant la création de l'Empire allemand en 1871. Dans les patois vosgiens de la haute Moselle, on nomme aussi l'Alsace "Ollemaine" ou "Almé" alors que les habitants des Vosges romanes se nomment des "Lôrés" (dont Lorrains).Les marchands et voyageurs qui passent par le pertuis de Bussang se distinguent bien sûr grâce à leur langue, parmi ceux-ci, il est logique de dénombrer en majorité les habitants de deux versants du massif, ceux de la vallée de la Thur et ceux de la vallée de la Moselle. Au XXVe siècle et XVIe siècle, les contrôleurs des péages situés du côté lorrain signalent des convois de marchands allemands qui passent tous les huit jours entre Colmar et Saint-Nicolas de Port. Un vigneron de Thann, donc de "l'Allemagne", déclare avoir "franchi le col de Bussang à plus de cent reprises dans les dernières décennies du XVe siècle". On se côtoie pour le transit, mais également au XIXe siècle quand des Alsaciens viennent peupler le pays de Bussang, particulièrement les cités ouvrières. Bussang comptait moins de 200 habitants au XVIe siècle, moins de 500 au XVIIe siècle et 1000 en 1789. L'apport de la population germanophone au XIXe siècle ont perpétué la tradition du contact des deux cultures dans la zone tampon des crêtes vosgiennes.Le col de Bussang comme quasiment l'ensemble de la ligne sommitale vosgienne n'est pas une limite hermétique, ni pour ce qui est du passage des personnes, ni pour l'interpénétration des fangues respectives.Certains noms de lieu sont bilingues ou plurilingues si l'on compte les versions dialectales. Des mots alsaciens sont entrés dans la langue patoise locale, au-delà du pays de la vallée de la Moselle. Le terme le plus emblématique est peut-être le mot "marcaire" qui est la prononciation romane de "Malker", le trayeur. Les marcaireries symbolisent avec les chaumes les hauts pâturages des sommets vosgiens très influencés par la culture helvético-alémanique. 

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire