Nombre total de pages vues

jeudi 16 juillet 2015

Le XIXe siècle de 1814 à 1870

La restauration (1814-1830) et la Monarchie de juillet (1830-1848)

Louis-Philippe Ier

La restauration est la période allant de la chute du Premier Empire le 6 avril 1814 à la Révolution de 1830.
Les Bourbons reviennent au pouvoir lors d'une période appelée Restauration qui débute le 6 avril 1814. Le 24 avril 1814, Louis XVIII débarque à Calais. Le 4 juin 1814, il accorde une charte par laquelle il consent volontairement à limiter son pouvoir. Il affirme par la même la souveraineté de droit divin du monarque. De ce fait, la charte de 1814 accorde un pouvoir important au roi, personnalité "inviolable et sacrée". L'initiative des lois lui est réservée, mais celles-ci sont votées par le Parlement composé de deux chambres: la Chambre des pairs dont les membres sont nommés à vie par le roi et dont le nombre est illimité, la Chambre des députés lesquels sont élus pour cinq ans au suffrage censitaire.Les députés parviennent à obliger les ministres à venir justifier leur politique devant eux, et à répondre à leurs questions.
La Restauration, qui semble bien partie malgré quelques obstacles, est abrégée par le retour de Napoléon en mars 1815, qui oblige Louis XVIII à fuir à Gand. Napoléon reprend le pouvoir pour une période de cent jours qui va durer jusqu'à la défaite de Waterloo du 18 juin 1815, laquelle réinstalle Louis XVIII sur le trône.
Louis XVIII se voulant un roi conciliant, sa politique n'est pas du goût des "Ultras" qui exigent un châtiment contre ceux qui ont soutenu Napoléon pendant les Cent-Jours. Dans ce climat de vengeance, les élections d'août 1815 leur donnant la majorité, et paradoxalement, ce sont eux qui mettent en pratique la responsabilité politique des ministres devant la chambre, ce que la charte de 1814 ne prévoyait pas.

A la mort sans héritier de Louis XVIII en septembre 1824, son frère Charles X lui succède. Contrairement à son frère, ce dernier n'a pas compris que certains changements étaient irréversibles. Il se fait sacrer à Reims en 1825 dans la pure tradition capétienne, et tente de rétablir l'Ancien Régime en favorisant la noblesse et le catholicisme. Il fait voter une loi sur l'indemnisation des nobles qui avaient émigré pendant la Révolution et dont les propriétés avaient été vendues comme biens nationaux. Une autre loi, dite loi sur le sacrilège, punit de mort le vol des ciboires contenant des hosties consacrées ou à la profanation de ces dernières. Il s'appuie sur les ultras, c'est-à-dire les députés partisans d'un retour à l'Ancien Régime. Mais sa politique réactionnaire se heurte à l'opposition déterminée de la bourgeoisie libérale. En 1830, le ministre Polignac publie quatre ordonnances réactionnaires. Elles prévoient le rétablissement de la censure pour la presse, la dissolution de la chambre, la modification du cens électoral pour réserver le droit de vote aux grands propriétaires fonciers, et la fixation de la date des nouvelles élections. La publication de ces ordonnances le 27 juillet 1830 provoque une révolution dite des Trois Glorieuses en juillet 1830.

Dans un Paris couvert de barricades, on crie vive la République ou vive l'Empereur. Mais dans les coulisses du pouvoir, des bourgeois modérés comme Adolphe Thiers ou Casimir Perier parviennent à imposer le duc d'Orléans comme nouveau souverain. La branche aînée de la famille royale, celle des Bourbons, est donc remplacée par la branche cadette, celle des Orléans. La bourgeoisie libérale a su utiliser la révolution populaire pour mettre sur le trône un roi conforme à ses intérêts. La révolution de Juillet ne constitue donc pas une rupture avec le régime précédent. Le principal changement est le fait que la souveraineté nationale remplace la souveraineté de droit divin. Ce changement se manifeste dans le titre donné au roi: Louis-Philippe devient roi des Français, c'est-à-dire qu'il détient son pouvoir de la volonté du peuple, alors que ses prédécesseurs portaient le titre de roi de France. La Chambre des pairs perd son influence.Le drapeau tricolore remplace définitivement le drapeau blanc.

La Monarchie de Juillet correspond aux débuts de l'industrialisation de la France.La France expérimente, dans le sillage de l'Angleterre, un boom ferroviaire des années 1840, qui stimule la production d'acier. Le Premier ministre Guizot lance le credo d'une nouvelle société: "enrichissez-vous!". Les grandes dynasties bourgeoises, liées aux banques ou aux grandes entreprises, se constituent et affirment leur volonté de dominer la vie politique. Le suffrage censitaire étant très restreint, elles sont les seules, avec l'aristocratie traditionnelle, à pouvoir voter et à avoir des élus à la Chambre des députés. Cela se traduit par l'apparition de deux partis politiques, les conservateurs, les représentants de la vieille noblesse, et les libéraux, les représentants du monde des affaires. Mais ces deux groupes s'entendent sur la conservation du régime tel qu'il est, puisqu'il sert leurs intérêts. La loi Guizot de 1833 oblige chaque commune à entretenir une école élémentaire. Cependant la révolution industrielle crée une nouvelle classe sociale, celle des ouvriers en proie à la misère. Les théories socialistes de Louis Blanc et de Proudhon cherchent à remédier aux injustices sociales dont le prolétariat est la victime.

La Monarchie de Juillet est aussi marquée par un nouvel essor de la colonisation française. L'incident diplomatique du coup d'éventail donné par le dey d'Alger au consul français en 1827 sert de raison à la conquête française de l'Algérie 1830.La colonisation s'étend progressivement à toute l'Afrique. En 1842 les généraux Binger, Crozat et Marchand se lancent à la conquête de la Côte d'Ivoire, mais doivent faire face à la résistance de Samory.

Le roi se présente comme un bon père de famille bourgeois, mais en réalité, c'est un homme autoritaire et un habile manoeuvrier. La faiblesse du corps électorat, l'autorité du roi, et la révélation d'une grande corruption au sein du gouvernement finissent par discréditer totalement le régime. De plus, à la suite de mauvaises récoltes, le pays connaît une crise économique profonde à partir de 1846. L'opposition républicaine en profite pour s'agiter à nouveau.
  

Le Consulat (1799) et le Premier Empire (1804)

Le Premier Empire
Bonaparte fait rapidement rédiger une constitution, la Constitution de l'an VIII. Il y est désigné comme premier consul donc de fait à la tête de l'exécutif. Il a le pouvoir de nommer aux principales fonctions publiques et il a le pouvoir d'initiative des lois et du budget. Il y a trois consuls en tout mais les deux autres, Cambarcérès et Lebrun, n'ont qu'un pouvoir consultatif. Bien que Bonaparte possède une grande partie du pouvoir législatif, il prend soin de créer quatre assemblées mais aucune n'est élue par les citoyens. Leurs membres sont choisis par le premier consul ou par le Sénat, une des quatre chambres. Parmi elles on peut signaler le Conseil d'Etat qui doit préparer, rédiger les projets de la loi et interpréter les lois. Il est à l'origine du conseil d'Etat actuel. Le suffrage universel est rétabli mais il n'y a plus d'élections. Les Français sont consultés pour des plébiscites.Le pouvoir personnel de Napoléon Bonaparte est renforcé par la constitution du 16 thermidor an X (4 août 1802). Il est consul à vie et peut nommer son successeur de son vivant. Les pouvoirs des assemblées sont réduits au profit des senatus-consulte acte émanant du Sénat. Les élections sont rétablies mais elles se déroulent à plusieurs degrés et seuls les 600 citoyens les plus imposés peuvent faire partie du collège départemental. De plus, les citoyens ne choisissent pas des représentants, ils proposent des candidats dans ce qui est appelé des "listes de confiance". De plus, les citoyens ne choisissent pas des représentants, ils proposent des candidats dans ce qui est appelé des "listes de confiance". De plus les libertés publiques sont supprimées: liberté de presse, de réunion, censure dans l'édition et le théâtre.
Bonaparte renforce la centralisation administrative. A partir de 1800, il nomme à la tête de chaque département, un préfet et un sous-préfet par arrondissement. Il prend soin aussi de nommer ou de faire nommer les maires. Les préfets sont chargés de mettre fin aux divisions nées de la Révolution et de briser tout ce qui reste de particularismes locaux. Les institutions financières et judiciaires sont organisées de la même manière, les juges étant nommés par le premier Consul.
Napoléon Bonaparte rétablit progressivement la stabilité financière. Il créé la Banque de France en 1800, la seule institution à pouvoir émettre de la monnaie. En 1803, le décret de Germinal créé le franc, dit franc germinal. La pièce d'un franc est d'un poids invariable de 5g d'argent. Elle gardera la même valeur jusqu'en 1914.La promulgation du code civil de 1804 permet l'achèvement de l'unité du pays. Ce code, en projet depuis 1789, traite de la famille, de la propriété et des contrats. Il mélange les règles de droit écrit et les coutumes des différentes régions dans un texte applicable à tous les Français.La loi du 16 septembre 1807 crée la Cour des comptes, un corps unique centralisé de contrôle des comptes publics.Le premier consul met aussi fin au brigandage et à l'insécurité dont souffraient beaucoup de départements. En 1804, les Français acceptent par plébiscite que Napoléon Bonaparte devienne empereur héréditaire sous le nom de napoléon Ier. On sait aujourd'hui qu'il a choisi le titre d'empereur pour ne pas se mettre à dos une partie de la population anti-monarchiste et par préférence à l'Antiquité. Ce n'est qu'après la flamboyante victoire d'Austerlitz le 2 décembre 1805 qu'il envisage de créer un empire continental.

  Napoléon à la bataille d'Austerlitz

Sous Napoléon Bonaparte, la France est presque sans arrêt en guerre. En 1810, à l'apogée du Premier Empire, elle compte 130 départements qui englobent les Pays-Bas, une partie de l'Allemagne jusqu'au Danemark et une partie de l'Italie. Les annexions sont en grande partie dues à la nécessité pour Napoléon de faire respecter le blocus continental qui vise à asphyxier le Royaume-Uni économiquement. De plus, un grand nombre d'Etats sont inféodés à la France: la Confédération du Rhin, la Confédération helvétique, les royaumes d'Italie, de Naples et d'Espagne. En tout, près de la moitié de l'Europe est sous influence française. Mais cette domination est de plus en plus contestée. En effet, la France favorise son économie aux dépens des Etats vassaux. En 1812, pour contraindre la Russie à respecter le blocus continental qu'elle a rompu, Napoléon Ier l'envahit. Mais il s'avance de manière trop imprudente jusqu'à Moscou et doit effectuer une retraite en subissant les rigueurs de l'hiver et les assauts des troupes et des partisans russes. Il perd 90% de ses effectifs. Le désastre de la campagne de Russie en 1812-1813 précipite la fin du Premier Empire. Une nouvelle coalition se noue contre la France. En octobre 1813, à la suite de la défaite de Leipzig, les Français doivent évacuer l'Allemagne. Les Pays-Bas et l'Espagne sont perdus. En 1814, la France est envahie. Napoléon abdique en avril et devient roi de l'île d'Elbe. Le frère du roi Louis XVI, le comte de Provence, devient roi sous le nom de Louis XVIII. La France garde ses frontières de 1792, incluant la Savoie et le comté de Nice, et peut conserver toutes les oeuvres confisquées à l'étranger. Mais en 1815, Napoléon Ier s'enfuit de l'île d'Elbe et revient au pouvoir à partir du 20 mars jusqu'au 18 juin 1815, date à laquelle il est définitivement vaincu à Waterloo et envoyé en exil dans l'Atlantique Sud, sur l'île de Sainte-Hélène. La France paie durement les Cent-Jours. Elle doit rendre une grande partie des oeuvres pillées et perd les acquisitions de 1792, Savoie et Nice notamment plus la Sarre. Elle doit en outre payer l'entretien d'une force d'occupation de 150 000 soldats.

Crises et succès de la République

L'exécution de Louis XVI le 21 janvier 1793

A l'automne les armées de la Révolution occupent les Pays-Bas autrichiens, la rive gauche du Rhin, la Savoie et Mulhouse. Danton fait sienne la théorie des frontières naturelles et encourage les guerres de conquête bien loin de l'idéal révolutionnaire de libération des peuples opprimés. A Paris, la nouvelle assemblée élue au suffrage universel pour voter une nouvelle constitution, la convention, est occupée par le procès du roi à partir de décembre 1792. Son exécution le 21 janvier 1793 soulève l'indignation de l'Europe monarchiste et entraîne la formation de la première coalition en février.

La jeune république est vite assaillie de toutes parts par les coalisés qui franchissent les frontières aux printemps 1793. A partir de mars 1793, l'Ouest de la France est la proie d'une insurrection catholique et royaliste, appelée guerre de Vendée.Les Girondins, l'aile droite de la Convention, qui dirigent le pays depuis la proclamation de la république, veulent respecter les institutions en place et veulent réduire Paris où l'agitation et la pression des sans-culotte sont permanentes, à 1/83e de la France. Ils tiennent à maintenir des institutions décentralisées face à l'aile gauche de la Convention qui réclame des mesure d'exception face aux difficultés.

Robespierre, homme politique révolutionnaire, admirateur de Jean-Jacques Rousseau, père de la démocratie populaire mais aussi acteur de la Terreur.


Sous la pression des sans-culottes les Girondins sont chassés de la Convention par les journées révolutionnaires des 31 mai et 2 juin 1793. Les Montagnards qui forment la partie la plus radicale de l'assemblée arrivent au pouvoir. Ils n'hésitent pas à satisfaire certaines revendications du peuple parisien pour garder le pouvoir et surtout, sauver la République menacée de chaos face aux menées contre-révolutionnaires des royalistes en Vendée et ailleurs, à la révolte des Girondins contre la "dictature parisienne" appelée révolte fédéraliste et à l'avancée des coalisés sur le territoire français. Les Montagnards instaurent un gouvernement révolutionnaire, c'est-à-dire un gouvernement extrêmement centralisé dans lequel les décisions sont prises par un organe issu de la Convention, le Comité de salut public, dominé par la forte personnalité de Robespierre. Ces mesures extraordinaires doivent sauver la révolution par la Terreur (envers les ennemis de la République) et la vertu (des patriotes). Le 23 août 1793, la levée en masse est décrétée. C'est le premier exemple dans l'histoire de France d'une conscription obligatoire de tous les jeunes hommes célibataires. C'est aussi la première fois que l'économie nationale est presque entièrement tournée vers l'effort de guerre. Lors des journées des 4 et 5 septembre, les sans-culottes demandent que la Terreur soit mise "à l'ordre du jour". Cette demande est transmise à la Convention le 5 septembre, mais sans que les députés ne l'instaurent officiellement. Le 10 octobre 1793, le gouvernement est déclaré révolutionnaire jusqu'à la paix avant d'être régi officiellement par le décret du 14 frimaire (4 décembre). Sous la pression du peuple qui souffre de la faim, relayée par les sans-culottes, les députés adoptent des mesures économiques d'urgence: à la loi du 27 juillet 1793 contre l'accaparement qui punit de la mort la spéculation, ils ajoutent le 11 septembre le maximum national des grains et des farines et le 29 septembre 1793 une nouvelle loi du maximum général sur les denrées et les salaires. L'ensemble de ces mesures d'exception permet de vaincre les révoltes et de dégager les frontières dès l'automne 1793.Les armées françaises, commandées pour la plupart par des généraux issus du rang, passent de nouveau à l'offensive.Les régions conquises deviennent des départements: celui du Mont-Blanc, des Alpes-Maritimes et du Mont-Terrible (Mulhouse-Bâle). En 1794 la Belgique est reconquise ainsi que la rive gauche du Rhin, Robespierre, qui veut renforcer la Terreur alors que la situation ne le justifie plus, est renversé le 9 thermidor an II (27 juillet 1794) et exécuté le lendemain.

Les Conventionnels mettent fin au régime d'exception qu'a été la Terreur. Ils rédigent une nouvelle constitution, celle du Directoire, qui partage le pouvoir exécutif entre 5 directeurs et le pouvoir législatif entre deux assemblées. Le suffrage censitaire est rétabli.Mais la constitution ne permet pas de résoudre les conflits entre les différents pouvoirs. Le Directoire est une période où les multiples élections et les coups d'Etat se succèdent. L'insécurité est très grande ainsi que la misère populaire. Par contre, sur le plan extérieur, les conquêtes et les annexions sont nombreuses.La Belgique et une partie de la Hollande sont transformées en 9 départements français le 1er octobre 1796. En 1798, c'est au tour de la rive gauche du Rhin et de Genève d'être organisés en cinq départements. Les frontières naturelles sont largement atteintes. Si on ajoute que les Provinces-Unies, la Suisse et l'Italie sont transformées en républiques soeurs avec des institutions calquées sur celles du Directoire et une politique étrangère inféodée à celle de la France, les frontières naturelles sont même dépassées. Si les républiques soeurs bénéficient des acquis révolutionnaires comme la suppression de la féodalité et l'égalité en droit, elles doivent fournir des réquisitions et des oeuvres d'art, ce qui rend vite la présence française impopulaire.

La lassitude des Français induite par les désordres intérieurs permet au général Napoléon Bonaparte d'être favorablement accueilli, quand par le coup d'Etat du 18 brumaire (9 novembre 1799), il met fin au Directoire. Le général est en effet très populaire depuis ses éclatantes victoires lors de la première campagne d'Italie (1796-1797). Il bénéficie de plus de puissants appuis politiques. Son frère Lucien Bonaparte est président du conseil des cinq-cents, une des deux assemblées du Directoire. Sieyès fait appel à lui pour renverser le régime et pouvoir ainsi en établir un autre plus stable. Mais dès qu'il est au pouvoir Napoléon Bonaparte le confisque à son profit et établit un régime personnel: le Consulat.
 

La naissance d'une France nouvelle (suite)

L'abolition des privilèges et de la féodalité pousse les constituants, pétris de rationalisme et des idées de Lumières, à réorganiser la France pour lui donner l'unité qui lui faisait défaut. L'assemblée décide de supprimer l'enchevêtrement des anciennes circonscriptions administratives et décide le 15 janvier 1790 de créer une circonscription administrative unique pour la justice, l'administration, la religion, la collecte des impôts, gérant la chose publique de manière très décentralisée. Il s'agit des 83 premiers départements, gérés par des conseils de département élus et divisés eux-mêmes en districts, en cantons et en communes. La suppression des douanes intérieures, la décision de créer de nouvelles unités de poids et mesures basées sur le système décimal et valables dans toute la France, la rédaction de codes unifiant le droit à l'échelle nationale, l'égalité en droit pour les protestants et les juifs sont autant d'initiatives propres à consolider l'unité nationale à mettre au crédit des Constituants. La suppression des corporations par le décret d'Allarde et l'interdiction des rassemblements paysans et ouvriers par la loi Le Chapelier en 1791 participent de ce désir d'unité, mais entraînent à long terme une faiblesse des corps intermédiaires, notamment des syndicats. L'affaire des princes possessionnés d'Alsace et de l'annexion d'Avignon et du Comtat Venaissin en 1790 permet aux révolutionnaires de poser un nouveau principe du droit international, le droit des peuples à disposer d'eux-mêmes.

Par contre, la réorganisation du clergé catholique sans l'autorisation de la papauté suscite une profonde division dans le royaume. La constitution civile du clergé votée le 12 juillet 1790 transforme les évêques et les curés en fonctionnaires élus et devant prêter serment de fidélité à la Nation. Cette loi est condamnée par le pape, ainsi que la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen.La France est alors divisée en deux: le monde rural soutient plutôt les prêtres réfractaires, ceux qui refusent de prêter serment pour obéir au pape, les citadins plutôt les jureurs, ceux qui acceptent le serment à la Nation. L'hostilité du roi et d'une immense majorité de la noblesse aux changements est un autre élément fondamental de division. De nombreux nobles émigrent, formant à la frontière allemande une armée d'émigrés prête à intervenir. Louis XVI louvoie, espère la guerre et une défaite française pour retrouver son pouvoir absolu. Celle-ci est déclarée le 20 avril 1792 par toute nouvelle assemblée législative issue de la Constitution de 1791, la première jamais votée en France. Les défaites des premiers combats et l'invasion du territoire national ont pour conséquence la chute de la monarchie le 10 août 1792 et la proclamation de la République le 22 septembre 1792. Deux jours avant, le 20 septembre 1792, une armée composée de jeunes volontaires patriotes avait arrêté l'avance prussienne à Valmy. Si la victoire militaire est minime, son impact symbolique est très fort.

 

La révolution française (1789-1799)

La naissance d'une France nouvelle

Prise de la Bastille le 14 juillet 1789

1789 est une année riche en événements. Incapable d'établir un impôt universel, Louis XVI a convoqué les Etats généraux pour le 5 mai 1789 à Versailles. Les députés du tiers état parviennent en deux mois et sans violence à mettre fin à la monarchie absolue avec l'aide d'une partie du clergé et de la noblesse. Le 14 juillet 1789, les Parisiens exaspérés par la crise économique et l'arrivée de troupes autour de Paris prennent d'assaut la Bastille. Cet événement est à l'origine de deux symboles de la République, la fête nationale et le drapeau tricolore. En effet, le 17 juillet, le roi, venu à Paris entériner les nouvelles institutions parisiennes nées de la prise de la Bastille, accepte de porter la cocarde tricolore: le blanc, la couleur royale, entouré des deux couleurs de Paris, le bleu et le rouge. A la fin du mois de juillet 1789, les campagnes sont agitées par la Grande Peur, une révolte contre les droits féodaux. Pour mettre fin à l'agitation les députés votent dans la nuit du 4 août 1789, l'abolition des privilèges et des droits féodaux. Même si ces derniers sont déclarés rachetables lors de la rédaction des décrets, entre le 5 et le 11 août, cette date marque la fin de l'Ancien Régime et le début d'une nouvelle société. 

La Déclaration des droits de l'homme et du citoyen votée le 26 août 1789 en est l'acte de baptême. Ce texte reconnaît l'égalité des citoyens devant la loi, consacre la souveraineté nationale et légitime le droit à la résistance à l'oppression. Avec le retour forcé du roi à Paris les 5 et 6 octobre 1789, la Révolution semble avoir atteint ses buts: faire naître une monarchie parlementaire en rabaissant le prestige du roi.


La Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1793

Les Représentants du Peuple Français, constitués en Assemblée Nationale, considérant que l'ignorance, l'oubli ou le mépris des droits de l'Homme sont les seules causes des malheurs publics et de la corruption des Gouvernements, ont résolu d'exposer, dans une Déclaration solennelle, les droits naturels, inaliénables et sacrés de l'Homme, afin que cette Déclaration, constamment présente à tous les Membres du corps social, leur rappelle sans cesse leurs droits et leurs devoirs, afin que les actes du pouvoir législatif, et ceux du pouvoir exécutif, pouvant être à chaque instant comparés avec le but de toute institution politique, en soient plus respectés, afin que les réclamations des citoyens, fondées désormais sur des principes simples et incontestables, tournent toujours au maintien de la Constitution et au bonheur de tous.

En conséquence, l'Assemblée Nationale reconnaît et déclare, en présence et sous les auspices de l'Etre suprême, les droits suivants de l'Homme et du Citoyen.

Art.1er. Les hommes naissent et demeurent libres et égaux en droits.Les distinctions sociales ne peuvent être fondées que sur l'utilité commune.

Art.2.Le but de toute association politique est la conversation des droits naturels et imprescriptibles de l'Homme. Ces droits sont la liberté, la propriété, la sûreté, et la résistance à l'oppression.

Art.3. Le principe de toute Souveraineté réside essentiellement dans la Nation. Nul corps, nul individu ne peut exercer d'autorité qui n'en émane expressément.

Art.4. La liberté consiste à pouvoir faire tout ce qui ne nuit pas à autrui: ainsi, l'exercice des droits naturels de chaque homme n'a de bornes que celles qui assurent aux autres Membres de la Société la jouissance de ces mêmes droits. Ces bornes ne peuvent être déterminées que par La Loi.

Art. 5. La loi n'a le droit de défendre que les actions nuisibles à la Société. Tout ce qui n'est pas défendu par la Loi ne peut être empêché, et nul ne peut être contraint à faire ce qu'elle n'ordonne pas.

Art.6. La Loi est l'expression de la volonté générale. Tous les Citoyens ont droit de concourir personnellement, ou par leurs Représentants, à sa formation. Elle doit être la même pour tous, soit qu'elle protège, soit qu'elle punisse. Tous les citoyens étant égaux à ses yeux sont également admissibles à toutes dignités, places et emplois publics, selon leur capacité, et sans autre distinction que celle de leurs vertus et de leurs talents.

Art.7. Nul homme ne peut être accusé, arrêté ni détenu que dans les cas déterminés par la Loi, et selon les formes qu'elle a prescrites. Ceux qui sollicitent, expédient, exécutent ou font exécuter des ordres arbitraires, doivent être punis, mais tout citoyen appelé ou saisi en vertu de la Loi doit obéir à l'instant: il se rend coupable par la résistance.

Art.8. La loi ne doit établir que des peines strictement et évidemment nécessaires, et nul ne peut être puni qu'en vertu d'une Loi établie et promulguée antérieurement au délit, et légalement appliquée.

Art.9. Tout homme étant présumé innocent jusqu'à ce qu'il ait été déclaré coupable, s'il est jugé indispensable de l'arrêter, toute rigueur qui ne serait pas nécessaire peut s'assurer de sa personne doit être sévèrement réprimée par la loi.

Art.10. Nul ne doit doit être inquiété pour ses opinions, même religieuses, pourvu que leur manifestation ne trouble pas l'ordre public établi par la Loi

Art.11. La libre communication des pensées et des opinions est un des droits les plus précieux de l'Homme: tout Citoyen peut donc parler, écrire, imprimer librement, sauf à répondre de l'abus de cette liberté dans les cas déterminés par la Loi.

Art.12. La garantie des droits de l'Homme et du Citoyen nécessite une force publique: cette force est donc instituée pour l'avantage de tous, et non pour l'utilité particulière de ceux auxquels elle est confiée.

Art.13. Pour l'entretien de la force publique, et pour les dépenses d'administration, une contribution commune est indispensable: elle doit être également répartie entre tous les citoyens, en raison de leurs facultés.

Art.14. Tous les Citoyens ont le droit de constater, par eux mêmes ou par leurs représentants, la nécessité de la contribution publique, de la consentir librement, d'en suivre l'emploi, et d'en déterminer la quotité, l'assiette, le recouvrement et la durée.

Art.15. La Société a le droit de demander compte à tout Agent public de son administration.

Art.16. Toute Société dans laquelle la garantie des Droits n'est pas assurée, ni la séparation des Pouvoirs déterminée, n'a point de Constitution.

Art.17. La propriété étant un droit inviolable et sacré, nul ne peut en être privé, si ce n'est lorsque la nécessité publique, légalement constatée, l'exige évidemment, et sous la condition d'une juste et préalable indemnité.

La période révolutionnaire

La période révolutionnaire commence vers 1787. A cette époque la monarchie absolue est incapable de conduire les réformes, notamment fiscales, indispensables à la modernisation de la France face à la contestation des groupes privilégiés, parlements et noblesse en tête. D'autre part, les idées nouvelles portées par les philosophes des Lumières et les économistes anglais ont pénétré les couches aisées de la population qui réclament une monarchie parlementaire, la rationalisation des institutions et la libéralisation d'un système économique archaïque. La réaction nobiliaire et la crise économique jouent un rôle non négligeable dans l'ébranlement populaire. La période révolutionnaire se termine en 1814-1815, quand l'empereur Napoléon Ier est envoyé en exil d'abord à l'île d'Elbe et ensuite dans l'île de Sainte-Hélène. Napoléon Bonaparte, en consolidant certains acquis révolutionnaires, en exportant certains de ses aspects au cours de guerres et des conquêtes qui manquent son règne, en mettant fin à la guerre civile entre les Français, est considéré, aux yeux de ses contemporains, comme le continuateur de la Révolution. Traditionnellement les historiens distinguent deux temps majeurs pendant la période révolutionnaire: la Révolution française de 1789 à 1799 et la période napoléonienne (Consulat et Premier Empire) de 1799 à 1815.

Antilles et Amérique du Sud

En 1635, la Guadeloupe et la Martinique passent sous contrôle français.La culture du tabac, qui demande en main-d'oeuvre fournie au départ par des engagés européens, subit la concurrence du tabac de Virginie, plus compétitif.Les îles se tournent donc, à partir des années 1660 et 1670, vers l'exploitation sucrière, qui fera leur richesse. Au moment, Louis XIV envoie aux boucaniers de l'île d'Hispaniola, établis à Saint-Domingue (actuelle Haïti, soit la partie ouest de l'île) un gouverneur, afin de faire passer les républiques boucanières et flibustières sous sa coupe. L'opération est un succès: en 1697, l'Espagne, présente sur la partie est d'Hispaniola, reconnaît à la France la possession de Saint-Domingue. S'y développe durant les années qui suivent l'exportation du sucre, qui dépasse bientôt celle de la Jamaïque anglaise, pourtant grosse productrice.

La traite des esclaves africains prend de l'importance avec l'émergence de la culture de la canne à sucre, nécessitant une main-d'oeuvre importante à l'heure où les engagés se font de moins en moins nombreux. Le commerce triangulaire se met en place sur l'Atlantique, les Européens échangent des armes, munitions ou objets de pacotille en Afrique contre des esclaves, avant de revendre ceux-ci dans les colonies en échange des produits exotiques produits par celles-ci. Ces produits (dont le sucre), fortement demandés en Europe, y sont écoulés sur un marché dynamique et lucratif. Ce commerce, véritable système économique et maritime atlantique qui concerne toutes les Antilles, contribue autant à l'essor des colonies antillaises de la France que de grands ports comme Nantes ou Bordeaux, qui s'embellissent.
 

Nouvelle-France

Au XIe siècle, des marins français commencent à naviguer le long des côtes nord-est de l'Amérique du Nord. En 1524, Giovanni de Verrazzano explore pour le compte de François Ier le littoral et les environs de l'actuelle New York, puis descend jusqu'aux Antilles. Dix ans plus tard, en 1534, le même François Ier envoie le malouin Jacques Cartier explorer de nouvelles terres aux environs de Terre-Neuve. Cartier parvient jusqu'à l'estuaire du fleuve Saint-Laurent, puis remonte celui-ci, prend officiellement possession des lieux découverts au nom du roi de France, et atteint plusieurs campements amérindiens. Un second voyage s'ensuit, l'année suivante, lors duquel il pousse jusqu'à l'actuelle Montréal et croit avoir découvert une région riche en or, ce qui motive le roi dans la préparation d'une troisième expédition, cette fois-ci de colonisation.Mais celle-ci, qui a lieu en 1541, échoue et il faut désormais attendre un demi-siècle pour assister à l'installation des Français sur les rives du Saint-Laurent. Néanmoins, si cette première entreprise de colonisation n'atteint pas ses objectifs et si les guerres de religion détournent longuement le regard de la monarchie de l'Amérique,les flottes des pêcheurs bretons, basques et normands fréquentent régulièrement les côtes de Terre-Neuve et l'estuaire du Saint-Laurent dans leurs campagnes de pêche à la morue assurant une présence française indirecte, discrète et périodique.

Profitant de cette présence qui s'intensifie à partir des années 1580, Henri IV, souhaitant relancer l'effort maritime et outremer de la France, pacifiée par la fin des guerres de religion, octroie en 1598 puis en 1603 des monopoles commerciaux, destinés à encourager l'installation à Terre-Neuve. C'est l'Acadie qui est colonisée en première, lorsque Pierre Dugua de Mons et Jean de Poutrincourt fondent Port-Royal en 1605. En 1608, Québec est officiellement fondée par Samuel de Champlain, qui s'efforce de développer la colonie naissante. En 1614, il scelle, au nom de la France, une alliance avec les Indiens Hurons, qui engage les Français dans la guerre contre les Iroquois, ennemis des Hurons. Alors que, plus au sud, les Anglais s'installent sur les côtes de Virginie (1607) puis du Massachussetts (1620), et que les Hollandais font de même sur l'île Manhattan, la Nouvelle-France s'étend timidement, sous la pression iroquoise et avec des moyens financiers, militaires et politiques limités, voire parfois presque dérisoire. Le cardinal de Richelieu, qui perçoit l'importance et les avantages du commerce maritime et de l'expansion coloniale, réussit à relever partiellement une colonie québécoise délaissée par la régence de Marie de Médicis, et créé en 1627 la Compagnie des Cent-associés, qui détient le monopole de tout commerce avec la Nouvelle-France mais également la gestion de celle-ci. Elle ne parvient toutefois pas à s'imposer, subissant des revers d'abord militaires en 1629, lorsque les Anglais s'emparent de Québec une première fois-rendue en 1631-et détruisent une flotte de secours, puis commerciaux, la traite des fourrures ne constituant pas un atout économique assez fort pour faire face aux dettes qu'accumule la compagnie. Elle survit au cardinal un peu plus de vingt ans, jusqu'à sa dissolution par Louis XIV en 1663.

A la même date, la colonie passe sous contrôle royal direct. Colbert, dont l'objectif est de former une industrie nationale puissante et de développer pour ce faire le commerce maritime, se lance dans un projet de modernisation et de peuplement de la Nouvelle-France, qui doit devenir à réellement devenir un empire économiquement prospère et politiquement imposant. Depuis la mort de Richelieu en 1642, une nouvelle période d'oubli de la part de la métropole s'était ensuivie pour la colonie, sous-peuplée au regard de l'essor démographique des possessions anglaises. L'exploration du territoire repose alors sur les missionnaires, notamment jésuites, qui évangélisent les tribus amérindiennes, et sur des aventuriers et trappeurs individuels, parfois hors-la-loi, nommés coureurs des bois ou voyageurs. Les Grands Lacs sont atteints dans les années 1640, Montréal est fondée en 1642, mais, dans l'ensemble, la présence française est fragile à l'arrivée de Louis XIV. Celui-ci, conseillé par Colbert, entreprend de pacifier la colonie en acculant les Iroquois à la défaite en 1666, de s'assurer le contrôle de l'Acadie rendue par les Anglais en 1667, puis de peupler la colonie, notamment par l'envoi, au cours des années 1660 et 1670, d'orphelines ou de veuves-les fameuses filles du roi.

A partir de 1689, commence une série de guerres coloniales contre les Anglais, les deux adversaires ajoutant à leurs rivalités continentales une concurrence commerciale, maritime et territoriale dont les colonies constituent la principale scène de conflit.La fondation de la Louisiane Française en 1699, qui achève d'encercler les possessions anglaises confinées sur le littoral atlantique, ne fait qu'exacerber les tensions. Par le traité d'Utrecht de 1713, la France reconnaît la perte de l'Acadie et de la Baie d'Hudson. Si les années 1730 et 1740 sont celles du développement relatif du commerce atlantique et d'une longue paix avec la Grande-Bretagne, propice à la croissance économique et à la stabilité sociale, la Louisiane reste sous-développée et le Canada sous-peuplé face aux concurrents anglais. L'empire français nord-américain manque de plus d'une véritable continuité, l'intérieur de son territoire officiel ou revendiqué étant le plus souvent à l'écart de la présence française, qui ne s'y manifeste qu'au travers d'un réseau décousu de forts. Les colons britanniques se sentent cependant de plus en plus menacés, surtout lorsque les Français s'implantent dans la vallée de l'Ohio au milieu du XVIIIe siècle. En 1754 éclate la guerre de la Conquête, pendante de celle de Sept Ans en Europe. L'issue en est désastreuse pour l'empire colonial français: Québec est prise en 1759, Montréal se rend en 1760, et le traité de Paris de 1763 entérine la perte par la France du Canada et de la Louisiane. Momentanément récupérée en 1800, celle-ci est définitivement vendue aux Etats-Unis trois ans plus tard.
  

Formation d'un premier empire colonial

C'est à l'époque moderne et sous l'égide des Bourbons que la France se dote d'un premier empire outremer, en élaborant, pour la première fois de son histoire, une vaste entreprise de colonisation. Celle-ci, qui débute véritablement dans la première moitié du XVIIe siècle, s'appuie principalement sur le commerce maritime sucrier avec les Antilles, la traite des noirs en provenance d'Afrique et celle des fourrures en Amérique du Nord. Malgré les efforts de Richelieu puis de Colbert, le vaste ensemble que forme la Nouvelle-France, s'étaient du Québec actuel à la vallée du Mississippi, n'arrivera jamais à se développer, hormis en quelques points localisés, du fait d'une récurrente faiblesse démographique et du désintérêt progressif du pouvoir royal pour ces contrés lointaines. Les possessions antillaises, au contraire, prospèrent à partir de la fin du XVIIe siècle et se hissent au sommet d'un système commercial atlantique lucratif qui concentre davantage l'attention de la monarchie. L'Inde est également l'objet de convoitises françaises qui échouent cependant à s'imposer face aux Britanniques au XVIIIe siècle, tandis que plusieurs comptoirs, notamment au Sénégal actuel, sont implantés sur la côte ouest de l'Afrique afin de servir de bases pour le commerce des esclaves. Ils seront, plus tard, le point de départ de la seconde expansion coloniale de la France sur le continent africain.

Le siècle des Lumières

Louis XV par Hyacinthe Rigaud


Louis XV règne de 1715 à 1774. N'ayant que cinq ans à la mort de son arrière-grand-père, Louis XIV, le pouvoir est confié à un conseil de régence dirigé par le duc d'Orléans. Celui-ci a pris soin de faire casser le testament du roi défunt, qui limitait son pouvoir, par le parlement de Paris en échange d'un retour au droit de remontrance. Un des pouvoirs autonomes muselés par Louis XIV retrouve ainsi un pouvoir de contestation de la monarchie dont il se servira tout au long du XVIIIe siècle. L'époque est au relâchement des moeurs, au boom économique, à la spéculation.Le goût pour les produits exotiques favorise le développement des ports de l'Atlantique. Les marchands de produits coloniaux, la monarchie et les trafiquants d'esclaves font d'éclatantes fortunes et les colons importent des produits manufacturés de France. Le port de Nantes se développe et les négriers se font construire à Nantes, à Bordeaux et à La Rochelle d'imposants bâtiments. La Nouvelle-Orléans est fondée en 1718.
 
Quand le régent meurt en 1723, Louis XV s'appuie sur un de ses ministres, Fleury, son ancien précepteur en qui il a toute confiance, jusqu'à la mort de celui-ci en 1743, date à laquelle le roi prendra alors les rênes effectifs du pouvoir. Sous son règne, la France s'agrandit. En 1735, la Lorraine, principauté souveraine, plusieurs fois occupée par la France, est donnée à Stanislas Leszczynski, roi malheureux, chassé du trône de Pologne par les Russes et les Autrichiens, et beau-père de Louis XV. A sa mort en 1766, elle entre dans le domaine royal. La Corse est cédée par la République de Gênes en 1768. Auparavant en 1762, la région des Dombes avait, elle aussi, rejoint le domaine. Sous les règnes de Louis XV et de Louis XVI, est entreprise une politique de simplification et de régularisation des frontières. Il s'agit de procéder à des échanges de places avancées avec les Etats voisins pour éviter les enclaves aussi bien françaises en dehors des frontières qu'étrangères à l'intérieur du territoire. En 1789, il n'existe plus que trois enclaves étrangères en territoire français, Avignon et le Comtat qui appartiennent au pape, la principauté de Montbéliard et la République de Mulhouse.
 
C'est d'ailleurs au XVIIIe siècle que se forge la théorie des frontières naturelles de la France. Un mémoire adressé au roi précise: "La France effectivement doit se tenir bornée par le Rhin et ne songer jamais à faire aucune conquête en Allemagne. Si elle se faisait une loi de ne point passer cette barrière et les autres que la nature lui a prescrites du côté de l'occident et du midi: mer céane, Pyrénées, mer Méditerrannée, Alpes, Meuse et Rhin, elle deviendrait alors l'arbitre de l'Europe et serait en état de maintenir la paix au lieu de la troubler". Pendant son règne, Louis XV refuse plusieurs fois les propositions qui lui sont faites d'annexer les Pays-Bas autrichiens (la Belgique actuelle) en échange de son alliance ou de sa neutralité, sans que les historiens en comprennent bien la raison.Le refus de Louis XV d'annexer les Pays-Bas autrichiens montre que cette idée n'est pas, à ce moment, la doctrine officielle de l'Etat.
 
En pendant la guerre de Sept ans (1756-1763), la France perd son importance politique d'outre-mer, notamment en Amérique (perte de la Nouvelle-France) et en Inde (où elle ne conserve que Yanaon, Chandernagor, Karikal, Mahé et Pondichéry) en cédant ses territoires à la rivale Grande-Bretagne par le traité de Paris de 1763.
 
Le règne de Louis XV est très brillant sur le plan culturel, avec l'apparition des philosophes des Lumières tels Voltaire, Rousseau, Montesquieu, Diderot et D'Alembert.
 
Louis XVI en costume de sacre

Le plus grand problème de l'Etat est alors le déficit budgétaire chronique qui conduit à rendre le roi dépendant des financiers et des manieurs d'argent. Autre source de paralysie des systèmes de gouvernement, l'opposition des parlements, se posant en défenseur des lois du royaume et en contre-pouvoir. S'opposant à toute tentative de réformes du royaume, elle contribue à la crise de la monarchie absolue sous le règne de Louis XVI.
 
Le petit-fils de Louis XV, Louis XVI, arrive au pouvoir en 1774. Il est gauche et timide. Il vit dans une cour traversée par les intrigues et les coteries. Son règne est marqué par une politique velléitaire. face aux pressions de la cour, des parlements et de la noblesse, il est incapable de prendre les mesures nécessaires pour combler une dette publique et un déficit budgétaire démesurés. L'aide apportée aux insurgés américains aggrave encore le déficit. Plusieurs autres facteurs expliquent les difficultés de la monarchie absolue.
 
Malgré les tentatives de centralisation administrative, le pays est loin d'être unifié. Il existe des douanes intérieures entre les provinces, il n'y a pas d'unité des poids et mesures. Tout ceci entrave le développement économique de la France à un moment où l'Angleterre est en plein décollage industriel. Les impôts ne sont pas perçus de la même manière dans tout le pays, même si les intendants en supervisent la répartition et la levée. Malgré les efforts entrepris depuis François Ier avec l'ordonnance de Villers-Cotterêts, les lois ne sont pas les mêmes dans tout le royaume. Le nord est encore soumis au droit coutumier, à peu près 300 coutumes, alors que le sud est régi par un droit écrit, inspiré du droit romain. L'Ancien Régime avait l'habitude de ne rien supprimer mais de superposer. De ce fait dans les années 1780, il existe un enchevêtrement de circonscriptions de tailles et de fonctions différentes: diocèses de l'Antiquité, bailliage et sénéchaussées du Moyen Âge, généralités du XVIe siècle.Par exemple: "Un habitant de Saint Mesnin résidait dans le bailliage de Semur, payait ses impositions à la recette de Semur, avait affaire au subdélégué de Vitteaux et à l'évêque de Dijon, si quelque affaire des eaux et forêts le retenait, c'était à la maîtrise d'Avallon qu'il devait se rendre, s'il avait besoin de la justice consulaire, c'est à Saulieu que son voyage le menait". Cette confusion s'explique par la manière dont le domaine royal s'est formé. A chaque acquisition, les rois promettaient de respecter les privilèges et les coutumes des provinces et des villes. A l'aube de la Révolution les particularismes régionaux restent très vifs.
 

mercredi 15 juillet 2015

L'âge classique: du XVIIe au XVIIIe siècle

Territoire sous règne français et conquêtes de 1552 à 1798


Le grand siècle


Aux XVIe siècle et XVIIe siècle, la théorie de la monarchie absolue prend de l'ampleur. Elle a comme principal relais dans les provinces les officiers de justice qui cherchent à réduire les droits de justice seigneuriale. La justice est en effet un puissant moyen d'unification du pays. Tous les cas peuvent aller en appel auprès du conseil du roi par le moyen des évocations. La coutume de Paris a tendance à s'imposer comme droit commun coutumier.
Louis XIII(1601-1643) a neuf ans quand son père Henri IV est assassiné en 1610. Sa mère Marie de Médicis assure la régence avec ses favoris et néglige l'éducation du jeune roi Louis XIII l'écarte du pouvoir en 1617 en faisant assassiner son favori Concini. A partir de 1624, il règne en étroite collaboration avec son principal ministre, le cardinal de Richelieu qu'il soutient contre les intrigues des nobles, furieux d'être écartés du pouvoir. Il mène une politique de domestication des grands seigneurs du royaume (affaire du comte de Chalais en 1626), de durcissement envers les protestants à qui il parvient à retirer les places-fortes que l'édit de Nantes leur octroyait. Il installe des intendants de justice, police et finance dans les provinces; Contrairement aux officiers ceux-ci sont des commissaires révocables. Ils sont indispensables dans les régions frontières ou occupées par les Français. Ils y assurent l'ordre en luttant contre les pillages des soldats français et en s'assurant de la fidélité des sujets, particulièrement des nobles et des villes. Le roi accentue la centralisation en favorisant l'atelier de frappe monétaire de Paris aux dépens de ceux de provinces. Dès 1635, Louis XIII et le cardinal de Richelieu s'engagent dans la guerre de Trente Ans auprès des princes allemands protestants pour réduire la puissance de la dynastie des Habsbourg, d'Espagne, la première puissance européenne à cette époque et de ceux d'Autriche qui sont à la tête du Saint-Empire romain germanique. Pour affaiblir les Habsbourg, les Français occupent des places fortes et s'assurent des passages qui les relient à leurs alliés, en Alsace, en Lorraine et dans le Piémont. L'augmentation considérable de la pression fiscale, nécessitée par la guerre, provoque de nombreux soulèvements populaires: en 1636-1637 celui des croquants de Saintonge-Périgord, en 1639 celui des va-nu-pieds de Normandie, sévèrement réprimés.


 Louis XIV en manteau de sacre par Hyacinthe Rigaud

Louis XIV a quatre ans et demi quand son père meurt en 1643. Sa mère Anne d'Autriche assure la régence avec le cardinal Mazarin. Jusqu'en 1661, date de sa mort, c'est ce dernier qui gouverne effectivement, même après la majorité de Louis XIV. Il poursuit l'effort de guerre entamé par Richelieu. Les troupes françaises remportent des victoires décisives qui permettent de mettre fin à la guerre de Trente Ans (1618-1648). Le traité de Münster d'octobre 1648 accorde à la France presque toute l'Alsace, confirme la possession des trois évêchés et donne trois forteresses à la France sur la rive droite du Rhin, Landau, Philippsbourg et Brisach. Mazarin poursuit ainsi la politique de passage vers le Saint-Empire romain germanique entreprise par le cardinal de Richelieu. Le conflit se poursuit cependant avec l'Espagne jusqu'en 1659. Avec la paix de Pyrénées, le domaine royal s'agrandit du Roussillon, de l'Artois et de certaines places du Hainaut comme Thionville et Montmédy. Louis XIV épouse l'infante d'Espagne, Marie-Thérèse d'Autriche. Pour la première fois, dans un traité signé par la France, la frontière entre la France et l'Espagne est définie par la nature: "les crêtes des montagnes qui forment les versants des eaux".

A la mort de Mazarin, en 1661, Louis XIV déclare qu'il gouvernera désormais seul, c'est-à-dire sans premier ministre. Il réclame de ses secrétaires d'Etat une stricte obéissance et leur interdit de décider sans lui. Pour être sûr d'être obéi de ses ministres, il les choisit parmi la bourgeoisie comme Colbert ou Le Tellier. Le règne de Louis XIV marque une centralisation extrême du pouvoir royal. Les grandes décisions sont prises par le conseil d'en haut qui se réunit deux ou trois fois par semaine et où ne siègent que 3 à 5 ministres. Les intendants sont plus que jamais la voix du roi dans les provinces. Dès le début de son règne personnel (1661-1715), Louis XIV amorce le redressement de l'autorité royale. Les gouverneurs des provinces, issus de la haute noblesse n'ont plus d'armée à leur disposition et doivent résider à la cour, ce qui rend plus difficile le clientélisme. En 1665, Louis XIV interdit aux parlements de délibérer sur les édits et leur ordonne de les enregistrer sans vote.Les états provinciaux de Normandie, Périgord, Auvergne, Rouergue, Guyenne et Dauphiné disparaissent. Avec Colbert, il entreprend de réformer la justice et fait rédiger toute une série d'ordonnances ou codes applicables dans le tout royaume. N'étant pas sûr de la fidélité des officiers propriétaires de charges héréditaires, il confie leurs fonctions à des commissaires révocables. Ce procédé finit par contraindre les officiers à l'obéissance. La noblesse perd tout pouvoir politique. Elle est domestiquée à Versailles où son plus grand souci est de se faire remarquer du roi. Pour cela, elle doit faire des dépenses excessives et en est réduite à quémander des pensions au roi pour assurer son train de vie fastueux.

Louis XIV pense que la guerre est la vocation naturelle d'un roi. Mais au début de son règne, l'armée est encore une entreprise privée monopolisée par la noblesse. Sous l'égide de Le Tellier puis de son fils Louvois, les officiers sont contrôlés par des administrateurs civils qui s'appliquent des réglementations strictes, les dépouillant d'une grande partie de leur pouvoir. Les efforts faits pour moderniser et discipliner l'armée permettent à Louis XIV de remporter d'éclatantes victoires dans la première partie de son règne personnel. La guerre de Dévolution (1667-1668) lui permet de conquérir de nouvelles places fortes au nord de la France parmi lesquelles Dunkerque, Lille et Douai. Le traité de Nimègue de 1678 met fin à la guerre de Hollande. Louis XIV n'a pu réduire les Pays-Bas mais acquiert la Franche-Comté au détriment de l'Espagne. Des échanges de places fortes permettent de régulariser la frontière au nord. En 1680-1681, Louis XIV, fort de sa domination sans partage sur l'Europe procède à la politique des "réunions". Le but est de relier le chapelet de places fortes élaborées par Vauban. En pleine paix il annexe entre Nancy et Strasbourg. Cette violation du droit international indigne les Etats d'Europe. Louis XIV s'aliène les Etats protestants en révoquant l'édit de Nantes en 1685.

Ses rapports avec l'Angleterre se tendent. en effet la France commence à peupler la Nouvelle-France entre 1635 et 1654 la Guadeloupe est conquise par Léonard de l'Olive et Duplessis d'Ossonville, en 1682 Cavelier de la Salle découvre ce qu'il appelle la Louisiane, les Français fondent des comptoirs commerciaux en Inde, ce qui concurrence les projets britanniques. Les 25 septembre 1688 Louis XIV lance un ultimatum exigeant que la trêve qui lui accordait des "réunions" pour 20 ans soit transformée en traité définitif. Il fait occuper et dévaster le Palatinat dont il revendique la succession. Ceci entraîne la guerre de la Ligue d'Augsbourg dirigée par Guillaume d'Orange, Stathouder de Hollande, devenu roi d'Angleterre avec sa femmes Marie II. La guerre est indécise et coûte très cher alors que la France connaît une période de disette en 1693. Louis XIV accepte de négocier, il rend les "réunions" mais conserve Strasbourg par le traité de paix de Ryswick de 1697.

La guerre de Succession d'Espagne, menée par un coalition européenne pour empêcher le comte d'Anjou second fils du dauphin de devenir roi d'Espagne commence en 1701. La France après quelques victoires connaît de nombreux revers. La paix est signée à Utrecht en 1714 et confirme l'accession d'une branche des Bourbon sur le trône d'Espagne.Le vieux roi qui meurt en 1715, voit son fils et son petit-fils mourir avant lui. Son héritier est donc son arrière-petit-fils né en 1710.




La guerre de religion

Nuit de la Saint-Barthélémy, d'après François Dubois


Les règnes des trois fils d'Henri II, François II (1559-1560), Charles IX (1560-1574) et Henri III (1574-1589) sont marqués par les guerres de religion entre protestants et catholiques. La Réforme s'est progressivement répandue en France à partir de 1520, au point qu'en 1562, date du début des huit guerres de religion, un dixième de la population était devenue protestante. Cette guerre civile est marquée par le massacre de la Saint-Barthélémy, le 24 août 1572 et les jours suivants, où les protestants sont attaqués dans leurs propres maisons par la Ligue, faisant plusieurs milliers de victimes à Paris et en province. La guerre civile est aussi une grande menace pour l'unité territoriale. Les protestants et les ligueurs font des promesses aux souverains étrangers pour obtenir leur aide. Par exemple, les réformés promettent à Elisabeth Ire d'Angleterre de lui restituer le Calaisis en échange de son intervention. De plus les troubles permettent à chacun des partis en présence de s'arroger des parcelles du pouvoir régalien. Les princes catholiques sont tout puissants dans les régions dont ils ont obtenu le gouvernement comme les Guise en Bourgogne, les Montmorency en Languedoc. L'édit de Beaulieu de 1576 permet aux protestants de célébrer leur culte publiquement partout sauf à Paris. Ils peuvent occuper huit places fortes et bénéficient de chambres mi-partie dans les parlements. Ils constituent alors un véritable Etat huguenot dans l'Etat. L'édit de Nantes de 1598 ne revient qu'en partie sur ces privilèges.

Après l'assassinat commandé par Henri III du duc de Guise, chef de la Ligue catholique en France, l'université de théologie de la Sorbonne décrète, lors d'une assemblée tenue le 7 janvier 1589, la déchéance du roi tyran. Cette même assemblée fait savoir que "le peuple français était délié du sommet de fidélité prêté à Henri III et qu'il pouvait s'armer pour la défense de la religion". Cela suffira au moine Jacques Clément à assassiner le roi six mois plus tard. Le trône, ne possédant plus d'héritier dans la branche des Valois, passe alors à une branche cadette, les Bourbons, en la personne d'Henri IV, auparavant roi de Navarre. Mais celui-ci étant protestant, il n'est pas reconnu par les ultracatholiques de la Ligue. Il lui faut reconquérir son royaume et se convertir au catholicisme, ce qu'il fait en 1593. Une fois son pouvoir consolidé, Henri IV met un terme aux Guerres de religion en promulguant l'édit de Nantes de 1598. Aidé de son ministre Sully, Henri IV tâche de remettre sur pied le royaume durement éprouvé par les guerres de religion. Lorsque Henri IV est assassiné par Ravaillac, un catholique fanatique en 1610, il lègue à son fils Louis XIII un royaime considérablement renforcé.
 

L'époque moderne

Evolutions et bouleversements du XVIe siècle

L'affirmation de la puissance royale

 Les parlers de France au XVIe siècle


De la fin du XVe siècle à la fin de la première moitié du XVIe siècle, la politique extérieure française est largement dominée par les guerres d'Italie. Les Valois veulent faire valoir les droits hérités de leurs ancêtres sur le royaume de Naples, et le duché de Milan. En 60 ans, ils conquièrent et perdent quatre fois Naples, six fois le duché de Milan. Finalement, ils abandonnent toute ambition en Italie. On peut se poser la question de l'utilité de telles expéditions, sans cesse recommencées et se terminant à chaque fois par des échecs. Il existe plusieurs facteurs explicatifs: l'attrait des richesses et de la culture des prestigieuses villes italiennes, la volonté d'avoir le contrôle de passage qui permettent de menacer les intérêts de Habsbourg par le Sud. Au XVIe siècle, les stratégies militaires se nouent, entre autres, autour de l'idée de frontière offensive. Il s'agit d'occuper des points d'appui pour en priver l'adversaire, plus que d'agrandir le territoire du royaume.


François Ier par François Clouet

En 1519, Charles Quint, roi d'Espagne depuis 1516, hérite des possessions des Habsbourgs (Empire d'Autriche, Pays-Bas, Franche-Comté). La France est l'obstacle à abattre pour unifier territorialement ses possessions. Il dispose aussi des inépuisables réserves d'or et d'argent des colonies espagnoles d'Amérique. François Ier se présente en vain à l'élection du Saint-Empire romain germanique pour limiter l'influence du Habsbourg. Il échoue aussi à s'assurer l'alliance d'Henri VII d'Angleterre. A partir de 1521, la France entame une guerre longue et difficile. Celle-ci commence par le désastre de Pavie en février 1525. François Ier, imprégné des valeurs chevaleresques refuse de reculer et est fait prisonnier. Il est contraint de signer le traité de Madrid en 1526, qui ampute la France d'un tiers de son territoire mais reprend la guerre aussitôt libéré. En 1529, il doit abandonner la suzeraineté de la Flandre et de l'Artois, deux possessions de Charles Quint. Ce dernier renonce à revendiquer la Bourgogne. Bien que combattant la Réforme dans le royaume, François Ier s'allie aux princes protestants allemands et même au sultan de l'Empire ottoman, Soliman le Magnifique pour desserrer l'étau habsbourgeois. Henri II continue la lutte. Il reprend le Boulonnais et le Calaisis aux Anglais. En échange de son soutien aux princes réformés allemands en guerre contre l'empereur Charles Quint, il obtient le droit d'occuper Calais, Metz, Toul et Verdun. En 1559, le traité du Cateau-Cambrésis signe enfin la paix entre la France et l'Espagne.

Au XVIe siècle, la guerre s'est considérablement transformée. L'artillerie dont le rôle est déterminant dans les batailles navales et dans les sièges commence à être utilisée pour les combats en rase campagne. La France, pour maintenir sa puissance dans le jeu européen, doit non seulement entretenir une armée permanente (les compagnies d'ordonnance créées par Charles VII), mais aussi posséder une solide artillerie et construire des forteresses capables de résister aux nouvelles techniques de guerre.

La Renaissance italienne gagne la France depuis, notamment par le biais des guerres d'Italie. François Ier amène Léonard de Vinci à sa cour. C'est l'époque de la construction des châteaux de la Loire: Blois, Chambord, Chenonceau, qui sont autant de lieux où triomphe la vie de cour. La sculpture, la peinture et l'architecture françaises se transforment sous l'influence du modèle italien donnant naissance à la Renaissance française dont la forme la plus aboutie est l'école de Fontainebleau. François Ier est le premier roi de France à avoir compris que le rayonnement artistique d'un pays est un élément de gloire et de puissance. Comprenant l'importance des possessions coloniales, François Ier finance des expéditions lointaines. En 1534, le Breton Jacques Cartier découvre la Nouvelle-France, et qui deviendra plus tard le Canada.

Tout ceci coûte fort cher. La taille est multipliée par quatre au cours du siècle, elle passe de 5 à 20 millions de livres. Mais les ressources fiscales sont insuffisantes pour financer les dépenses.Les rois de France ont recours à l'emprunt-la dette double entre 1522 et 1550-à la banqueroute en 1558 et 1567 qui permet d'annuler certaines dettes mais surtout d'en rééchelonner le paiement et à la vénalité des offices. Un office est une fonction publique dont le titulaire est inamovible depuis 1467 et qu'il achète. Si la vénalité existait déjà au XVe siècle, Louis XII et François Ier l'ont systématiquement développé. Avec elle s'instaure peu à peu l'hérédité officialisée avec la création de la paulette en 1604, une taxe annuelle 1/60e de la valeur d'achat de l'office. Si les avantages sont évidents, procurer aux rois des rentrées d'argent rapides, les inconvénients le sont aussi.

C'est sous le règne de François Ier que l'Auvergne rejoint définitivement le domaine royal. Henri IV fait l'acquisition de la Bresse, le Bugey, le pays de Gex, ce qui le met en situation de gêner les communications entre les possessions des Habsbourg. Dans un premier temps, il refuse d'unir à la couronne ses fiefs personnels sous prétexte de préserver les intérêts de sa soeur. Le parlement de Paris refuse, en 1590, d'enregistrer les lettres séparant les biens patrimoniaux de la famille de Navarre et le domaine royal. Après la mort de sa soeur, Henri IV accepte l'intégration de ses fiefs au domaine royal. C'est aussi au XVIe siècle, que se forge la théorie de l'inaliénabilité de domaine royal. Le roi ne peut plus donner en apanage des fiefs à ses fils cadets.

La guerre de Cent Ans












 La France en 1435





  •     En ligne rouge : les frontières du Royaume français en 1477
La France à la fin du XVe siècle 



La guerre de Cent Ans oppose la France et l'Angleterre pour la succession au trône de France, de 1337 à 1453. Malgré ce que son nom peut laisser croire, elle n'est pas continue mais compte 55 années de trêve pour 61 années de combats. Elle ne touche pas tout le royaume mais elle apporte la désolation et la mort là où elle a lieu: pillages, épidémies et désertification accompagnent les bandes de mercenaires qui, en l'absence d'intendance et de solde régulière, se paient en mettant à sac les régions où ils stationnent, même celles du prince qui les emploie. Pendant cet interminable conflit, le territoire français est le champ de combats épisodiques mais acharnés entre rois de France et rois d'Angleterre. Les Anglais bénéficient de la supériorité tactique de leur armée (et particulièrement de leurs archers). Ils infligent à la chevalerie française pourtant très supérieure en nombre, deux cuisantes défaites à Crécy en 1346 et Poitiers, bataille durant laquelle le roi de France, Jean II le Bon est fait prisonnier. Le dauphin Charles est contraint de signer le traité de Brétigny en 1360 qui concède aux Anglais un bon tiers du royaume de France, prévoit le paiement d'une énorme rançon de 3 millions d'écus d'or pour la libération de Jean II le Bon, soit l'équivalent des recettes du roi pendant deux ans. Celui-ci meurt à Londres en 1364 sans que la rançon ait été complètement versée.

Son fils, Charles V est un bon stratège: la paix obtenue permet de lui redonner les capacités de reconquérir les territoires cédés en évitant les grandes batailles rangées et confie à de grands capitaines tel Du Guesclin la reconquête du territoire en reprenant une à une les places fortes de l'ennemi par une stratégie de sièges successifs. En 1377 les Anglais ne contrôlent plus que la Bayonne, Bordeaux, Brest, Calais et Cherbourg.

Le redressement est provisoire.La folie de Charles VI plonge le pays dans la guerre civile entre Philippe Le Hardi duc de Bourgogne, oncle du roi, et Louis d'Orléans, frère du roi. Ce dernier prend le contrôle de l'Etat et s'allie avec des seigneurs du sud-Ouest hostiles au roi d'Angleterre. L'accent de ces méridionaux va donner le nom des partisans du duc d'Orléans: les Armagnacs. Le duc de Bourgogne a lui intérêt à ménager les Anglais qui commercent avec son comté de Flandre. Ces derniers profitent de la confusion pour lancer une chevauchée dévastatrice à travers la France. Après avoir évité Paris ils traversent la Picardie en direction de Calais. Ils sont rejoints à Azincourt en 1415 par la fine fleur de la chevalerie française. Les Français subissent de nouveau une défaite meurtrière face à une armée anglaise épuisée et moins nombreuse: le parti des Armagnacs est décapité. Le duc de Bourgogne, Jean sans Peur, en profite pour s'emparer de la Champagne puis de Paris. Son fils, Philippe le Bon, pousse Charles VI à signer le 21 mai 1420 le traité de Troyes qui stipule:

  • Charles VI doit déshériter son fils le dauphin Charles. Il le déclare inapte à régner dans la mesure où il a fait tuer le duc de Bourgogne Jean sans peur, le 10 septembre 1419.
  • Le roi Henri V d'Angleterre devient immédiatement régent du royaume de France et doit épouser Catherine de France, fille du roi fou.
  • A la mort de Charles VI, le royaume de France doit revenir au fils d'Henri V et de Catherine.
 Lorsque Charles VI meurt en 1422, la France est divisée en trois: le nord et l'ouest sont sous contrôle du frère d'Henri V, Jean de Lancastre duc de Bedford, en tant que régent du jeune roi anglais, futur Henri VI, le Nord-Est où est le duc de Bourgogne est quasi indépendant, le sud de la Loire où le dauphin, prend le titre de Charles VII mais est surnommé le "roi de Bourges" par la propagande anglaise qui met en doute sa légitimité (dans la mesure où le château de Bourges est la demeure favorite de Charles).
Mais la clé du conflit est celle du choix de la nationalité. Les Anglais par leur stratégie de pillage (les fameuses chevauchées) se sont fait haïr par le peuple et ne sont soutenus que par les artisans et les universitaires des grandes villes.Le rôle de Jeanne d'Arc est plus politique et psychologique que militaire: elle catalyse cette volonté "de bouter les Anglais hors de France". Elle participe au siège d'Orléans et après la bataille de Patay insiste pour que le sacre de Charles VII ait lieu à Reims (ce qui est extrêmement symbolique et interprété à l'époque comme un nouveau signe de volonté divine car la ville est en plein territoire bourguignon). Elle permet de justifier la naissance légitime du roi, faisant oublier les rumeurs prétendant qu'il était le fils illégitime du duc d'Orléans et permet son sacre.La voie est alors libre pour la reconquête du territoire français. Le rôle militaire propre de Jeanne d'Arc est faible: durant l'hiver 1429, elle s'empare du village de Saint-Pierre-le-Moûtier, échoue devant la bourgade de la Charité-sur-Lore avant d'être fait prisonnière devant Compiègne (24 mai 1430). La fin du conflit est proche: Charles VII fait la paix avec les Bourguignons en 1435 (traité d'Arras) et privés de leur puissant allié et sans soutien sur le terrain, les Anglais sont chassés de France en 1453 après la bataille de Castillon.
Les rois de France regagnent prestige et autorité. Ils ont encore affaire à forte partie avec les Grands Ducs d'Occident Philippe le Bon et Charles le Téméraire, qui ont joint les Pays-Bas à leurs possessions bourguignonnes et se posent parmi les plus puissants souverains d'Europe. Charles VII et son fils Louis XI les considèrent comme leurs principaux rivaux.
A la mort du Téméraire, ses possessions qui provenaient de la famille capétienne sont reprises par Louis XI mais les Pays-Bas reviennent à sa fille unique, Marie de Bourgogne qui les apporte à son époux Maximilien d'Autriche: le partage devient une source de conflit entre les maisons de France et d'Autriche.
Le Moyen Âge s'achève sur la fin de l'indépendance de fait des grandes principautés qu'étaient le duché de Bourgogne (1482) et le duché de Bretagne (vaincu en 1488, rattaché en 1491, et formellement uni au royaume en 1532).

Crises et mutations du bas Moyen Age (du XIVe au XVe siècle)

Tout l'Occident est affecté par les famines, la peste noire et de nombreux conflits. Mais la France, l'état le plus peuplé d'Europe, est davantage touchée par les malheurs, d'autant plus qu'elle est le cadre d'une guerre interminable entre 1337 et 1453, la guerre de Cent Ans.

Le temps des crises

A la fin du XIIIe siècle, on assiste en France à un retournement de conjoncture: il n'y a plus de terre à défricher. La production agricole stagne alors que la population continue à augmenter. L'épuisement des mines d'or et d'argent freine le développement de la monnaie et par là même les échanges commerciaux. Du début du XIVe siècle à la fin du XVe l'Europe entière connaît un petit âge glaciaire: les hivers sont plus longs et plus froids, les étés plus frais et plus humides, ce qui fait pourrir les récoltes sur pied. Les crises économiques qui en résultent entraînent des troubles politiques et sociaux accentués par la faiblesse de certains rois pendant la guerre de Cent Ans.

Dans les années 1315-1317, le mauvais temps entraîne des récoltes insuffisantes. Le prix des céréales augmente, ce qui génère la famine avec une surmortalité des plus pauvres. Les famines persistent jusqu'à la fin du XVe siècle.La situation des paysans est catastrophique: soit ils mangent la part de grains réservée aux semailles et la famine s'accentue l'année suivante, soit ils préservent les grains à semer et, dès la fin de l'hiver, la mortalité augmente, faute de nourriture suffisante. Les textes de l'époque font aussi état de loups entrant dans les villes pour se nourrir, car eux-mêmes privés de proies.

A partir de 1348, la peste qui avait déjà ravagé la France dans l'Antiquité et le haut Moyen Age, fait un retour en force provoquant la mort de presque un tiers de la population française. En 1361-1363, et en 1418-1419, une forme de peste fait ravage parmi les enfants. Les révoltes se multiplient, notamment à Paris: révolte d'Etienne Marcel, révolte des Cabochiens. Dans les campagnes les jacqueries sont nombreuses.

Les différentes crises ont eu aussi des aspects positifs.Les paysans et les artisans qui survivent aux famines et à la peste voient leur condition de vie s'améliorer du fait de la hausse des salaires causée par la raréfaction de la main-d'oeuvre. La noblesse décimée lors des grandes batailles de la guerre de Cent Ans se renouvelle. Les bourgeois achètent des seigneuries.
 
 

La fin des Capétiens directs

La lignée des Capétiens directs se termine par les règnes successifs des trois fils de Philippe IV qui meurent sans héritier mâle. Lorsque Charles IV le Bel, le dernier fils de Philippe le Bel, meurt en 1328, c'est la première fois depuis l'élection d'Hugues Capet que le défunt roi n'a pas d'héritier mâle. Deux prétendants sont en lice, Edouard III, roi d'Angleterre, petit-fils de Philippe le Bel et Philippe de Valois, neveu de Philippe le Bel. L'assemblée des grands du royaume préfère Philippe car il est de France et plus mûr que son jeune rival anglais. Cet événement marque le début de la dynastie des Capétiens-Valois, branche collatérale des Capétiens directs.

Les transformations économiques et sociales






Le bas de cet extrait de la tapisserie de Bayeux, XIe siècle, montre des travaux agricoles avec herse et charrue



Même si les sources écrites manquent, plusieurs indices montrent que la vitalité démographique de la France est très importante à partir du XIe siècle. Des hommes venus du royaume de France tiennent le premier rang dans la conquête en 1066 de l'Angleterre par Guillaume le Conquérant, duc de Normandie. Les chevaliers francs jouent un rôle prépondérant dans la reconquista de l'Espagne musulmane dès le milieu du XIe siècle. Ils sont si nombreux à participer à la première croisade à la fin du XIe siècle, que les Etats créés après la prise de Jérusalem en 1099 sont appelés Etats francs d'Orient. L'augmentation de la population accompagne les grands défrichements. Des nouvelles techniques agricoles se diffusent permettant de cultiver les terres riches et lourdes du bassin parisien: charrues à roue et à versoir qui aèrent le sol, herses qui brisent les mottes. Villages, églises et châteaux-forts façonnent le paysage des campagnes. Le retour à une paix relative favorise la circulation des marchandises et des hommes, la circulation monétaire et la renaissance des villes. Les artisans et les marchands se révoltent bien vite contre l'autorité tatillonne des seigneurs laïcs ou ecclésiastiques et parviennent à obtenir des chartes de libertés leur permettant de s'administrer eux-mêmes. Dans les villes, les artisans exerçant une même activité se regroupent en organisations professionnelles très rigides et protectionnistes.

Le XIIIe siècle consacre le rayonnement français. Les historiens pensent qu'au cours de ce siècle la population passe de 12 millions à 20 millions d'habitants, grâce aux améliorations des pratiques agricoles qui permettent l'augmentation des rendements des terres cultivées. Ceci n'empêche pas les campagnes d'être secouées par des révoltes, le plus souvent locales contre les droits féodaux ou la dîme. Pourtant le XIIIe siècle est celui des chartes d'affranchissement qui permettent aux paysans d'améliorer grandement leur condition juridique et fiscale. Paris devient la ville la plus importante de l'Occident chrétien avec près de 200 000 habitants, soit le double de Venise. Son rayonnement est assuré par son université, ses édifices religieux célèbres dans toute la chrétienté, telle que la Sainte-Chapelle où sont conservées les reliques de la couronne d'épines et du bâton de Moïse, la cathédrale Notre-Dame de Paris, ses ateliers de miniatures et d'ivoire. Pourtant dès le milieu du XIIIe siècle, des signes d'essoufflement économique apparaissent. Les petits seigneurs s'appauvrissent.La croissance de la population a abouti à un fractionnement des tenures. L'écart s'élargit dans les villes entre les riches et les pauvres entraînant des révoltes du "menu" peuple contre le peuple "gras" entraînant des grèves et des conflits comme à Douai, Paris, Ypres.

 

mardi 14 juillet 2015

Les Capétiens et la consolidation de l'Etat(XIe-XIIIe siècle)

L'évolution du pouvoir royal


Le royaume des Francs sous Hugues Capet


                                                                                               Carte dynamique illustrant la
                                                                                                       formation territoriale de la France 
                                                                                             métropolitaine de 985 à 1947.




Philippe-Auguste mène une lutte
victorieuse pour abaisser la puissance
des Plantagenêts et agrandir le
domaine


Le règnes des premiers Capétiens est marqué par la faiblesse du pouvoir royal face aux grands seigneurs à la tête de principautés. Hugues Capet n'intervient jamais au sud du royaume. Son autorité est limitée au domaine royal, les biens matériels et les vassaux directs sur lesquels il exerce un pouvoir direct. Les premiers Capétiens ne possèdent qu'un domaine peu étendu, réduit pour l'essentiel à une zone entre Beauvais et Orléans, vestige du duché de France de Robert le Fort. Par une politique habile de la plupart d'entre eux, ils assureront la croissance du domaine royal. Face aux grands du royaume quasi indépendants, ils possèdent cependant trois atouts:

  • Ils parviennent à rendre héréditaire leur lignage en faisant élire et sacrer leurs fils de leur vivant, et en les associant au trône (usage suivi jusqu'à Philippe Auguste).
  • Les rois de France sont au sommet de la hiérarchie féodale et ne rendent hommage à personne pour leurs possessions. Mais, féodalité oblige, tous les grands féodaux du royaume doivent l'hommage au roi. Les plus prestigieux vassaux du roi de France étaient les souverains d'Anjou et d'Angleterre. Par la moindre étendue de ses domaines placée sous son administration directe, le roi de France était plus faible que bien des vassaux, mais en termes de vassalité, c'était bien le roi de France qui se trouvait au sommet de la pyramide du pouvoir du système féodal. Un adage dit que "Rex francorum imperator est in suo regno": "le roi est empereur en son royaume".
  • Le sacre permet aux Capétiens d'acquérir un caractère divin à travers l'onction, faite grâce à l'huile de la sainte Ampoule, don du Saint-Esprit. Ainsi le roi, chrétien depuis le baptême de Clovis, devient de plus, un roi de droit divin, qui ne tient son pouvoir que de Dieu. Depuis Robert le Pieux, fils d'Hugues Capet, on attribue aux Capétiens des pouvoirs thaumaturgiques, par simple toucher, ils étaient censés guérir des écrouelles ou scrofules.
  
Le mariage d'Aliénor d'Aquitaine avec le comte d'Anjou, devenu roi d'Angleterre sous le nom d'Henri II Plantagenêt, fait de ce dernier un vassal du roi de France bien plus puissant que son suzerain, comme le montre la première carte. Philippe II, dit Philippe-Auguste a comme objectif principal l'abaissement des Plantagenêts. Entre 1202 et 1205, il fait la conquête sur jean sans Terre de la Normandie, du Maine, de l'Anjou, de la Touraine, du nord du Poitou et de la Saintonge. Jean sans Terre tente de réagir en organisant une coalition réunissant également l'empereur germanique Othon IV et le comte de Flandre. Le dimanche 27 juillet 1214, Philippe II triomphe de la coalition lors de la bataille de Bouvines.Sur le plan intérieur, Philippe-Auguste augmente les ressources royales par une bonne administration, ce qui lui permet de rétribuer des mercenaires, de construire des nouveaux remparts autour de Paris, de paver la ville et d'édifier la forteresse du Louvre. A sa mort, le domaine royal est considérablement agrandi. Ses successeurs vont continuer son oeuvre.

Son petit-fils, Louis IX, signe enfin la paix avec les Plantagenêt. Il affirme le droit du roi légiférer dans tout le royaume, y compris dans les grands fiefs quand l'intérêt commun l'exige. Il met en circulation une monnaie royale stable et fiable, le gros tournois d'argent valable dans tout le royaume. Il place définitivement la monarchie au dessus du bien commun. Ses légistes affirment que rien ne peut justifier la rébellion d'un vassal et qu'aucun évêque ne peut excommunier le roi. Louis IX se croise par deux fois pour combattre les musulmans en Terre sainte, de 1248 à 1254 (septième croisade) puis en 1270 en Egypte et à Tunis où il meurt de la peste le 25 août.

Philippe IV le Bel (1285-1314) est le dernier des grands Capétiens directs. Il est connu pour le rôle qu'il a joué dans la centralisation administrative du royaume. Il organise définitivement les parlements.Pendant tout son règne, il cherche à améliorer les finances royales. Comme il échoue à instaurer un impôt régulier, le budget de l'Etat fonctionne au moyen d'expédients: confiscation des biens des juifs, des marchands italiens, diminution du poids en métal précieux par rapport à leur valeur normale des pièces frappées par le roi. Pour trouver de nouveaux subsides, il organise la première réunion de représentants des trois ordres du clergé, de la noblesse et du tiers état. Ce type de réunion sera appelé plus tard Etats généraux. Il s'entoure de légistes originaires de toute la France. Mais Philippe le Bel est surtout connu pour son affrontement avec les papes, lesquels, pour échapper aux troubles continuels de Rome, s'installent à Avignon mettant pour trois quarts de siècle la papauté sous influence directe de la France. Quand il meurt en 1314, la monarchie capétienne semble consolidée et forte.