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mardi 5 janvier 2016

Les langues régionales en Alsace

Répartition géographique des dialectes parlés en Alsace au XXe siècle. Depuis le Welche a presque complètement disparu, le francique est en déclin, voire en danger, et la pratique de l'alsacien a beaucoup diminué.





















L'aire de diffusion traditionnelle des signes dialectaux d'allemand supérieur occidental (=alémanique) aux 19e et XXe siècle












Le chansonnier et cabarettiste Germain Muller en 1980
D'après une étude réalisée dans les années 1970-80, l'Alsace comptait alors une centaine de dialectes dont la majeure partie appartenait à l'alémanique.
La langue régionale majoritaire: l'alsacien

L'alsacien fait quelques emprunts lexicaux au français et a été longtemps la langue maternelle de la plupart des habitants. La première mention du dialecte alsacien date de 1369. L'historien E. Tonnelat y évoque les dits de Nicolas de Bâle: "c'est la première fois à notre connaissance que le mot de langue est appliqué à un dialecte allemand, "Elsasser Sproche" (l'alsacien)." Il est un dialecte alémanique comme celui parlé en Suisse alémanique, dans le Bade-Wurtemberg, l'ouest de la Bavière et le Vorarlberg autrichien. Il est parlé dans les trois quarts du Bas-Rhin sauf ses parties romanes. Le Rhin ne constitue donc nullement une frontière linguistique en ce qui concerne les dialectes.

Bernard Wittmann écrit dans Une histoire de l'Alsace, autrement: L'emploi de l'allemand à la place du latin vient renforcer la liberté conquise par les bourgeois en les affranchissant de la collaboration des ecclésiastiques pour la rédaction des chartes ou des correspondances officielles. L'emploi de l'allemand, langue du peuple, contribuera à l'émancipation des Alsaciens....Longtemps avant l'Allemagne, l'Alsace avait fait usage de l'allemand à la place du latin....A Strasbourg, la première charte allemande du "Urkundenbuch" est datée du 25 juin 1261....Dans les territoires des évêques de Basel comprenant une bonne partie de la Haute-Alsace, la première charte en allemand apparaît en 1255....En Allemagne, c'est seulement au XIVe que l'allemand fit timidement son entrée dans des documents officiels....Le mardi 16 février 1524, le vicaire Dieboldt Schwartz inaugurait la première messe en allemand dans la crypte de la cathédrale de Strassburg."

dans son Impossible Alsace: Histoire des idées autonomistes (Minorités), Jean-Clause Streicher écrit qu'après le traité de Westphalie, la France a favorisé la venue en Alsace "de bourgeois natifs de France, par conséquent plus sujets et plus obéissants....toute l'Alsace serait accoutumée aux moeurs, affection et langue françaises."

La politique linguistique de la France républicaine tendait à s'opposer à l'usage de l'alsacien ne lui attribuant aucune fonction officielle dans sa propre région. L'Alsace n'a néanmoins pas subi directement les lois et réformes de l'éducation nationale française de la Troisième république française jusqu'à la fin de la Première Guerre mondiale, car l'Alsace faisait alors partie de l'Allemagne. Les écoles enseignaient alors l'allemand standard, seule langue officielle, comme pendant la Seconde Guerre mondiale. Durant la période de 1871 à 1918, la langue française restait enseignée dans les enclaves romanes (situées au fond de quatre hautes vallées des Vosges et dans les villags francophones de l'actuel département de la Moselle).

Le français est l'unique langue officielle en vigueur pendant l'entre-deux-guerres et après la Seconde Guerre mondiale.

A la suite de la déconnexion progressive de l'alsacien d'autres parlers allemands, l'alsacien de nos jours ne suit plus l'évolution de l'allemand, gardant ainsi des forces linguistiques germanique-allemandes archaïques.

Dans le but de préserver l'alsacien, il existe depuis 1992 des sections bilingues paritaires en Alsace où l'enseignement est dispensé pour moitié en français et pour moitié en allemand standard, ayant l'avantage d'avoir une orthographe fixe et une forte présence dans les médias écrits ou audiovisuels. A l'heure actuelle, elles concernent environ 5% des élèves. Au lycée, les élèves peuvent passer l'abibac. L'alsacien peut être parlé en maternelle et enseigné ou parlé en primaire. Cependant, l'écrit est en allemand, considérant que celui-ci est la version écrite commune de l'ensemble des dialectes alsaciens.

Une partie de la population alsacienne parle encore aujourd'hui couramment la langue locale, l'alsacien, qui est une langue alémanique. Le reste est essentiellement composé de quelques communes jouxtant le Territoire de Belfort et dans les pays welche autrefois de patois roman, comme les vallées de Saint-Albray, de la Weiss (Orbey) et de la Liepvrette (Sainte-Marie-aux-Mines), quelques enclaves dans le massif des Vosges traditionnellement de parlers oil lorrains, en Alsace Bossue ou autour de Wissembourg, où les pratiques respectives des francique rhénan et francique mériodional sud-occidental demeurent avérées, quoiqu'en déclin. L'alsacien est la deuxième langue autochtone de France après le français si on considère l'occitan comme un ensemble de parlers non-homogènes.

Le célèbre Barabli de Germain Muller est entré dans l'histoire de l'Alsace (un spectacle en dialecte critique et drôle, qu'actualisait en permanence un comédien-auteur-metteur en scène à forte personnalité). Des pièces de théâtre en alsacien sont toujours représentées et parfois retransmises sur la chaîne de télévision France 3 Alsace.

Voilà un aperçu de l'alsacien à travers une comparaison avec le français et trois autres langues germaniques (l'allemand, le néerlandais et l'anglais):

français
allemand
alsacien
néerlandais
anglais
terre
Erde
arde
aarde
earth
ciel
Himmel
hemmel
hemel
heaven, sky
eau
Wasser
wàsser
water
water
feu
Feuer
fiir
vuur
fire
homme
Mann
mànn
man
man
femme
Frau
frài/frau
vrouw
woman
manger
essen
assa
eten
eat (to)
boire
trinken
trenga/trenke
drinken
drink (to)
grand
groß
groos
grrot
great
petit
klein
klain/glen
klein
little, small
gros/gras
dick/fett
déck/fat
dik/vet
thick/fat
nuit
Nacht
nààcht
nacht
night
jour
Tag
däi/dag
dag
day
aujourd’hui
heute
hit/héta
vandaag/heden
today
hier
gestern
gecht
gisteren
yesterday
demain
morgen
morn
morgen
tomorrow
matin
Morgen
morjia/morga
morgen
morning
midi
Mittag
médeu/médag
middag
noon, midday
soir
Abend
oowe/ova
avond
evening
être
sein (du bist)
sén (du béch)
zijn
be (to)
avoir
haben
hove/hàn
hebben
have (to)
ceci/cela
dies/das
dess/tsal
dit/dat
this/that
oui
ja
ja
yes
non
nein
nee/naij
nee
no
 

Les parlers différent d'un secteur à l'autre. Exemples: une tarte s'appelle weiha à Mulhouse, mais kuecha dans le nord, une pomme de terre se dit ardapfel à Mulhouse, et grùmber à Strasbourg.

Beaucoup de mots courants (bonjour, merci, au revoir) sont prononcés en français (bouchour, merssi, aurevoar), ce qui était interdit pendant l'occupation allemande. Dans le Haut-Rhin, on dit defanture et ce n'est que dans le nord que l'on utilise schoaeufanster.
   

Rot un Wiss

Le drapeau Rot un Wiss







Le drapeau Rot un Wiss est un drapeau alsacien historique qui n'a plus de reconnaissance officielle.Le drapeau du Reichsland Elsaß-Lothringen (1871-1919) s'inspire de ce drapeau en y ajoutant simplement une croix de Lorraine d'or.














 

Drapeau administratif

Après son rattachement à la France, le drapeau officiel de la région Alsace a été calqué sur le blason.

Dans un premier temps, on s'est basé sur le blason de 1949 qui juxtapose les blasons départementaux mais, depuis 1900 environ, la région Alsace a décidé de reprendre le blason historique qui date lui du XVIIe siècle.

Il a la même signification historique que le blason régional et que les blasons départementaux fusionnées. Ce drapeau reprend les couleurs alémaniques traditionnelles rouge et blanc auxquelles il ajoute 6 couronnes jaunes qui symbolisent les aspirations de la dynastie des Habsbourg originaire d'Alsace. Les Habsbourgs ont régné sur les différents peuples de l'Europe centrale durant plusieurs siècles. Le landgraviat de Haute-Alsace était une propriété originelle de la maison féodale dont la Stammburg Habichtsburg ou Habsburg se trouve dans la région, aujourd'hui du côté suisse du Rhin. La bande blanche en travers ornée de part et d'autre de dentelle blanche est le symbole des comtes de Werd qui régnèrent sur le nord de la région qu'on retrouve également le blason de ville de Strasbourg, les couleurs étant inversées.Le fond rouge est commun aux deux blasons départementaux. 

Héraldique

L'ancien blason d'Alsace est en fait une juxtaposition de deux blasons historiques, celui du landgraviat de Haute-Alsace (actuel département du Haut-Rhin) et celui de Basse-Alsace (actuel département du Bas-Rhin) qui est représenté contourné. Ce blason a été reproposé par Robert Louis et homologué par les deux préfets en 1948. Il est encore utilisé par la Région de gendarmerie d'Alsace (porté sur les uniformes des gendarmes en Alsace), mais n'est plus utilisé par le conseil régional d'Alsace.Le blason actuel est le blason historique alsacien. Il a été créé au XVIIe siècle sous le Saint-Empire et adopté ensuite sous le régime français par l'Intendance d'Alsace. Il a été récemment réhabilité par le Conseil régional d'Alsace. Il fusionne le blason historique de Basse-Alsace (De gueules à la bande d'argent côtoyée de deux cotices fleuronnées du même) symétrisé par Courtoisie héraldique et le blason historique de Haute-Alsace (De gueules à la bande d'or accompagnée de six couronnes du même, trois en chef et trois renversées en pointe). Il s'agit d'une fusion, et non d'une juxtaposition comme c'est le cas pour le blason précédent. Il se blasonne ainsi: de gueules à la bande d'argent accompagnée de deux cotices fleuronnées du même et accostée de six couronnes d'or ordonnées en orle, celles de la pointe opposées à celles du chef: les six couronnes du blason du Haut-Rhin sont ajoutées au blason du Bas-Rhin.

 Ancien blason de la Région Alsace























 Blason actuel de la Région Alsace





















Symbole

La cigogne


Cigogne et son cigogneau sur le toit d'une maison alsacienne


















La cigogne est attachée à de nombreuses légendes, en particulier celle d'apporter les bébés dans les familles.

Quasiment disparue dans les années 1970, elle a fait l'objet d'une stratégie associative de repeuplement. Celle-ci s'avère efficace, notamment grâce à la création de centres de réintroduction.Les cigognes sont désormais sont présentes sur de nombreux toits d'églises et autres édifices publics d'Alsace, et parfois sur le toit de maisons de particuliers. Contrairement aux cigognes qui, dans bien des pays (Hongrie, pays baltes par exemple), placent leurs nids sur des pylônes, les cigognes d'Alsace, aidées par les paniers posés par les habitants, les installent sur des bâtiments, généralement à une hauteur élevée.
 

Culture

Le folklore alsacien, contes, légendes, croyances populaires, etc..., est un folklore germanique rhénan, légèrement teinté de latinité et de celtisme.

L'identité alsacienne dans la nation française

L'Alsace possède une forte identité culturelle, à la fois française et germanique.La nation contrôlant l'Alsace a toujours cherché à effacer les liens historiques et culturels la reliant à l'autre nation. L'intégration culturelle alsacienne au sein de la nation française est essentiellement marquée par le soutien de la bourgeoisie d'Alsace à la révolution française, puis le rejet de l'Allemagne plus massif après la Seconde Guerre mondiale. Mais beaucoup plus que la Révolution Française l'attachement à la France pour les populations rurales et le petit peuple des villes est confessionnel. Pour les catholiques la France est un pays catholique comme eux. Pour les protestants l'attachement à la France est moindre.

D'après le géographe Paul Vidal de La Blache dans La France de l'Est, l'adhésion de la population alsacienne à la France a été scellée sur une base plus politique que culturelle. A ce titre, la lettre de Fustel de Coulanges adressée à Mommsen du 27 octobre 1870 puis le discours d'Ernest Renan à la Sorbonne le 11 mars 1882 soulignent le caractère politique inhérent à la construction d'une Nation. La confrontation entre la France et l'Allemagne est aussi une lutte entre des conceptions opposées de l'idée de Nation.

Mais jusqu'en 1870, la question de l'identité alsacienne n'était pas à proprement parler un problème. L'intégration à la France, qui commença dès 1648 avec le traité de Westphalie, s'apparentait essentiellement à un changement de souverain, les Alsaciens devenant des sujets du roi de France. Si Louis XIV prenait souvent pour les paysans dans leurs conflits avec les seigneurs, c'est également la stabilité retrouvée et les investissements colossaux réalisés par l'Etat (fortifications Vauban, creusement de canaux dont celui du Rhône au Rhin....), au fondement d'une reprise de l'activité économique, qui permirent de se concilier avec la population.

C'est surtout le célèbre écriteau placé sur le pont du Rhin, à Strasbourg, le 14 juillet 1791, pour la fête de la Fédération, ici commence le pays de la Liberté, qui symbolise l'adhésion de l'Alsace à la communauté nationale française. L'Alsace fournit beaucoup d'officiers à la France sous la Révolution (Kléber, Kellermann), et la Marseillaise fut chantée pour la première fois par Rouget de l'Isle à l'hôtel de ville de Strasbourg. L'Alsace fut un pays de commerçants, d'artisans, de bourgeois indépendants qui soutinrent la Révolution et les Républiques. La masse de la population était surtout concernée par des intérêts purement confessionnels.

Ainsi, les Alsaciens ont conservé leur culture germanique et leur réseau social traditionnel, tout en s'enrichissant de la culture française. La moindre tension franco-allemande suffisait à mettre en doute le sentiment national des protestants. Lorsqu'éclate le conflit contre la Prusse en 1870, c'est en citoyens, sous l'étendard français, que combattent les Alsaciens. La résistance de Belfort, qui ne fut pas annexée par les Prussiens, et la conduite héroïque des troupes françaises en très nette infériorité numérique à la bataille de Froeschwiller-Woerth ne sont pas étrangères à cette considération.

Mais le facteur déterminant de l'attachement à la France n'est pas ethnique ou linguistique mais lié au fait que la nation française, en 1871, est encore fondée sur les valeurs catholiques. A l'apposé, pour les protestants jusque là intégrés dans un Etat catholique, la guerre de 1870-71 et l'annexion à l'Empire Allemand s'annonce comme une revanche. Une phrase courante désignait les protestants comme pro-allemand et les catholiques comme pro-français. Ainsi, lors de l'incorporation des recrues, après octobre 1872, les campagnes catholiques comptent beaucoup de réfractaires, alors que dans le village protestant de Baldenheim, les conscrits défilent dans les rues derrière un drapeau portant l'inscription "Vive Guillaume, Empereur d'Allemagne".
   

Brève chronologie politique

  • ~90: Alsace germanique L'Alsace fait partie de la province romaine de Germanie Supérieure
  • 535: Alsace franque Clotaire annexe une grande partie de l'Alémanie, dont l'Alsace.
  • 843: Alsace germanique L'Empire carolingien, la Francie, est divisée en trois parties. L'Alsace se trouve dans la Francie médiane, la Lotharingie (octroyée en 843 à Lothaire Ier puis en grande partie en 870 à Louis le Germanique qui avait déjà la Francie orientale après 843), qui fera partie du Saint-Empire romain germanique (fondé sous Otton Ier en 962, il durera jusqu'en 1806 sous Napoléon Ier), qui lui, donnera approximativement l'Allemagne.
  • 925: l'Alsace est rattachée au Duché de Souabe
  • 1648: la Haute-Alsace devient française
  • 1697: les quatre cinquièmes de l'Alsace deviennent français (traité de Ryswick). Une grande partie de l'Alsace devient française par les traités de Westphalie en 1648. Strasbourg se rend à Louis XIV en 1681. Toute l'Alsace appartient maintenant à la France, hormis la ville de Mulhouse qui décidera en 1798 de se joindre à la République Française. 1648 et 1675 sont des années-clés de la progression de la conquête de l'Alsace.
  • 1871: Alsace allemande Vaincue, la France cède l'Alsace à l'Empire allemand
  • 1919: Alsace française L'Alsace redevient française après le traité de Versailles
  • 1940: Alsace allemande Victorieux sur la France, le IIIe Reich annexe l'Alsace
  • 1944: Alsace française L'Alsace redevient française
  • 1982: création de la région Alsace
  • 2013 (7 avril): Référendum sur la création d'une collectivité unique en Alsace par fusion de la région et des deux départements. Rejet dans les deux départements. Dans le Haut-Rhin le "Non" l'emporte et dans le Bas-Rhin où le "Oui" est majoritaire mais n'atteint pas le seuil requis de 25% des électeurs inscrits.
  • 2016 (1er janvier): L'Alsace intègrera la nouvelle grande région Est avec la Lorraine et la Champagne-Ardenne lors de la réforme territoriale.

Conséquences de la rivalité hégémonique franco-allemande

L'alternance de la domination franco-allemande, le fait pour la région d'être toujours en première ligne de l'affrontement de ces deux grandes puissances européennes, la crainte permanente de la guerre, les mesures prises par les Français et les Allemands pour "assimiler" la population alsacienne, les répressions, épurations, incorporations de force, déportations, pénuries en temps de guerre, ayant rythmé l'histoire de la région, ont laissé des traces profondes, encore perceptibles chez une partie de la population. La quasi-totalité de la population compte dans sa famille des victimes de la dernière guerre. Le sujet est souvent tabou, surtout en ce qui concerne les incorporés de force: les malgré-nous. La réintégration de l'Alsace dans la République ne s'est pas faite sans difficulté. La perception du dialecte alsacien, très proche de l'allemand, a entraîné de nombreuses maladresses, mal acceptées par la population alsacienne qui ne désire surtout pas être confondue avec ses voisins d'outre-Rhin et appelant leurs compatriotes "les Français de l'intérieur". Une petite partie de la population a également adopté une attitude de rejet, aussi bien envers leurs concitoyens qu'envers les Allemands sans pour autant être indépendantiste. L'usage du dialecte est comme dans de nombreuses régions françaises le moyen de préserver son histoire régionale.

L'Alsace de l'après-guerre

L'Alsace se relève rapidement de ses ruines, poussée essentiellement par sa position géographique. L'amitié franco-allemande instaure pour la première fois de l'histoire une paix durable dans la région.

La pression française

Une fois la guerre terminée, les malgré-nous furent considérés par l'opinion comme des traîtres. Ils ont également été fortement attaqués par les militants du Parti communiste français pour leurs dénonciations de la situation dans les camps d'internement soviétiques.

Les Malgré-nous et l'incorporation de force

Monument en hommage aux Malgré-nous dans le canton d'Obernai (Bas-Rhin)














 Quand fut signé l'armistice du 22 juin 1940, le cas de l'Alsace n'était pas évoqué. Ce territoire restait donc juridiquement français. Le régime nazi l'annexa de fait en juillet suivant sans en faire la proclamation officielle.

La propagande était active pour inciter les jeunes Alsaciens à s'engager dans la Wehrmacht. Beaucoup de jeunes Alsaciens refusaient de s'engager dans l'Armée allemande et de soutenir le régime. Les nazis proclamaient alors à ce moment qu'on n'avait pas besoin des Alsaciens pour gagner la guerre qui devait être rapide.

Alfred Wahl, professeur d'histoire contemporaine à l'université de Metz, écrit: "Seuls les fils des fonctionnaires allemands présents semblent avoir répondu à l'appel: ils furent moins d'nn millier pour les deux départements".

Le Gauleiter responsable du Reichsgau Baden-Elsaß, Robert Wagner, était persuadé que les "frères de race" nouvellement reconquis entendraient vite l'appel de leur sang et se sentiraient rapidement allemands mais constatant le nombre limité d'engagés volontaires, il conclut-non sans cynisme-que les jeunes hésitaient à entrer dans l'armée allemande "par peur de leur famille" et qu'ils seraient heureux de s'y voir forcés.

  • Dès septembre 1940, Marcel Weinum, âgé de 16 ans, organise un réseau de résistance constitué de 25 garçons de 14 à 16 ans et spécialisé dans la propagande, le sabotage et le renseignement appelé La main noire. A la suite d'un attentat contre le Gauleiter Robert Wagner, les membres du groupe sont tous arrêtés et dix d'entre eux sont jugés par un tribunal spécial. Marcel Weinum est condamné à mort et décapité à Stuttgart le 14 avril 1942.

La plaque commémorative apposée sur la façade du Collège épiscopal Saint-Etienne à Strasbourg

Au printemps 1942, à Vinnytsia, il persuada Adolf Hitler, au début fort réticent, d'instaurer l'incorporation de force en Alsace, ce qui fut fait officiellement le 25 août 1942.

100 000 jeunes Alsaciens seront ôtés à leurs familles et envoyés de force, principalement sur le front de l'Est, pour combattre l'armée de Joseph Staline. 30% furent tués ou portés disparus.

De nombreux autres furent faits prisonniers par les Soviétiques. Parmi eux, beaucoup choisirent de déserter la Wehrmacht pour se rendre délibérément à l'Armée rouge et ainsi, en tant que Français, rejoindre le général de Gaulle et la France libre, mais les soviétiques n'avaient, dans leur grande majorité, pas connaissance du drame de ces Alsaciens. Beaucoup furent donc considérés comme des déserteurs ou des espions, et donc fusillés, victimes d'une double méprise.Les autres ont été déportés au camp de Tamboy après un passage dans les mines de charbon de Karaganda. Dans un compte rendu du colloque de Hambourg sur le retour des prisonniers de guerre après 1945 on peut lire:

"Les Alsaciens en uniforme allemand furent concentrés dans le camp de Tambov et subirent le sort de tous les prisonniers de la Wehrmacht, avec des conditions de vie très dures, un taux de mortalité élevé et des campagnes de rééducation antifasciste. Libérés en grande majorité durant l'automne 1945, une partie des "malgré-nous" passe pourtant plusieurs années supplémentaires en captivité. Accusés de crimes de guerre par les Soviétiques, ils se sentent trahis par la France libre, et utilisés comme monnaie d'échange dans les négociations diplomatiques."

Le dernier malgré-nous libéré est Jean-Jacques Remetter, retourné chez lui en 1955.

lundi 4 janvier 2016

Le IIIe Reich

L'Alsace annexée par l'Allemagne nazie


















 

Politique d'assimilation

Le retour de la région dans le giron de la France ne s'est pas fait sans douleur ni maladresse de la part de l'administration française.

Sur le plan culturel, l'administration tenta de développer l'usage du français: l'alsacien est limité à l'école dans les communes à majorité francophone, même si l'enseignement religieux se fait en allemand ou en dialecte et que quatre ou cinq heures hebdomadaires d'allemand sont incluses dans les programmes, les fonctionnaires s'expriment généralement en français. L'ordre est donné d'utiliser la méthode d'enseignement directe dans les écoles, qui consistait à utiliser le français sans transition. Les habitants de l'Alsace en 1918 furent divisés en quatre classes de citoyens, marquées par les inscriptions A-B-C-D sur leurs cartes d'identité. Ce classement des citoyens fut établi en fonction de l'ascendance et d'enquêtes, plus ou moins fiables dans un climat de délation, sur le degré de francophilie. Chaque classe correspond à des droits civiques différents.

Les autorités françaises mettent en place une politique d'épuration. 112 000 personnes seront également expulsées. Au printemps 1919 des commissions de triage sont chargées de l'examen individuel des Alsaciens selon les propos, les positions prises ou leur attitude supposée.

L'Alsace dans la République française

Signature du traité de 1919 dans la galerie des Glaces














  • 1919:l'Alsace redevient française, à la suite de la ratification du traité de Versailles. Landau, cependant, demeura définitivement allemand, seul reliquat de l'Alsace allemande depuis 1815

La Première Guerre mondiale

  • 1914: incursions de l'armée française dans le sud de l'Alsace, combats autour de Mulhouse. Thann devient capitale de l'Alsace française. La majorité des soldats alsaciens font partie de l'armée allemande, hormis quelques milliers de déserteurs qui viennent s'enrôler en France.
  • 1915: combats au collet du Linge et autour de l'éperon rocheux du Hartmannswillerkopf (aussi appelé le vieil Armand) à 17km de Mulhouse, devenu monument national.
  • Pour le restant de la guerre, stabilisation du front sur une ligne Pfetterhouse-Altkicrch-Thann-Hartmannswillerkopf-Munster-Collet du Linge-Col du Bonhomme
  • 1918: entrée des troupes françaises en Alsace après l'armistice du 11 novembre

L'Alsace dans l'Empire allemand

L'Alsace-Lorraine en 1871






















 Le souvenir, statue à Nancy, commémore la perte de l'Alsace-Moselle lors de la guerre franco-allemande de 1870
















  • 1871 (10 mai): par le traité de Francfort, l'Empire allemand annexe l'Alsace, sauf les environs de Belfort ainsi qu'une partie de la Lorraine. Une politique visant à éliminer la francisation menée depuis l'annexion est mise en place.
  • 1872 (28 avril): un rescrit impérial institue l'université allemande de Strasbourg.
  • 1874 (2 février): élection au Reichstag des premiers élus de la terre d'empire. Jusqu'en 1890, date de la disparition de Bismarck, seuls les députés protestataires contestant l'annexion de la région par l'empire allemand seront élus.
  • 1874 (29 octobre): un décret institue une Assemblée régionale d'Alsace-Lorraine.
  • 1902: libération du régime allemand et forte croissance économique: reflux de la contestation anti-allemande
  • La découverte de gisements de potasse en 1904 par Amélie Zurcher et Joseph Vogt amena un nouvel essor dans le sud de la région en propulsant tout le nord de l'agglomération mulhousienne dans l'exploitation minière. La société minière Gewerkschaft Amélie est créée le 13 juin 1906. Le 22 avril 1908, le premier puits est foré et l'exploitation industrielle commence en 1910.
  • 1911 (31 mai): adoption de la Constitution d'Alsace-Lorraine dans le cadre de l'autonomie alsacienne décidée par l'empire allemand. L'unique élection à la diète (Landtag) d'Alsace Lorraine se déroule les 22 et 29 octobre 1911. Le Zentrum (parti catholique) est le premier parti du Reichsland avec 31% des voix, le SPD (social démocrate) le deuxième avec 23,8% des voix. L'Elsass-Lothringischer Nationalbund (parti autonomiste francophile) de Wetterlé n'obtient que 3% des voix et aucun élu.
  • 1913: l'affaire de Saverne montre les tensions grandissantes entre les Alsaciens et Mosellans et l'Empire.
 

De la Révolution française à Napoléon III

L'Alsace participe activement à la révolution contre la monarchie.
  • 1789: la Révolution est accueillie avec enthousiasme par les Alsaciens qui se soulèvent contre la noblesse locale. L'héritage révolutionnaire scelle le lien géo-politique des Alsaciens à la France.
  • 1790: l'Alsace est partagée en deux départements: le Bas-Rhin et le Haut-Rhin. Strasbourg devient la préfecture du Bas-Rhin et Colmar celle du Haut-Rhin.
  • 1793: un certain nombre de territoires étrangers enclavés dans ces départements, appartenant à la noblesse germanique (les "princes possessionnés"), sont annexés à la France par la Convention nationale.
  • 1798: Mulhouse, alors alliée à la Confédération suisse, vote sa Réunion à la République française, qui a lieu le 4 janvier 1798, à l'époque du Directoire.La Stadtrepublik Mülhausen devient la commune de Mulhausen. L'Alsace est à présent intégralement française. La même année, la communauté juive de Dornach rédige le Memorbuch du même nom. Il contient des prières en mémoire des victimes des persécutions en Allemagne, en Autriche, en Bohême, en Espagne, en Pologne et en Hollande.
  • Période napoléonienne: l'Alsace fournit 70 généraux à la Grande Armée de l'Empire français dont les strasbourgeois Kléber et Kellermann ou le rouffachois François Joseph Lefebvre, maréchal d'Empire.
 Episode de la guerre de 1814 (Théophile Schuler, 1870)
  •  1800: les communes de l'ancienne Principauté de Montbéliard ainsi que la commune de Mandeure sont intégrées au département du Haut-Rhin
  • 1803: les catholiques et les juifs peuvent à nouveau s'installer dans Mulhouse.
  • 1815: Landau est annexé par le Royaume de Bavière.
  • 1816: les communes d'Abbévillers, Aibre, Allenjoie, Allondans, Arbouans, Audincourt, Badevel, Bart, Bavans, Bethoncourt, Bretigney, Brognard, Courcelles-lès-Montbéliard, Couthenans, Dambenois, Dampierre-les-Bois, Dasle, Désandans, Dung, Etouvans, Etupes, Exincourt, Fesches-le-Châtel, Grand-Charmont, Issans, Laire, Mandeure, Montbéliard, Nommay, Présentevillers, Raynans, Sainte-Marie, Sainte-Suzanne, Saint-Julien-lès-Montbéliard, Semondans, Sochaux, Taillecourt, Valentigney, Le Vernoy, Vieux-Charmont et Voujeaucourt sont détachées de la région pour être rattachées au département du Doubs
  • 1826: André Koechlin monte une fonderie et se lance dans la construction mécanique en créant André Koechlin&Compagnie (AKC) cette société est l'ancêtre de la SACM et d'Alsthom (devenue Alstom).

Victor Schoelcher, Abolition de l'esclavage

  • 1848: Victor Schoelcher, homme de gauche d'origine alsacienne, est nommé président de la commission d'abolition de l'esclavage, il est l'initiateur du décret du 27 avril 1848 abolissant définitivement l'esclavage dans l'empire colonial français. La même année la commune de Mulhausen est rebaptisée commune de Mulhouse.

L'Alsace dans l'Empire allemand


  • 1852: l'Alsace vote massivement en faveur du plébiscite sur l'Empire de Napoléon III.
  • 12 décembre 1866: Naissance à Mulhouse du futur prix Nobel de chimie Alfred Werner
  • 19 juillet 1870: déclenchement de la guerre franco-prussienne de 1870 
-Bataille de Wissembourg (4 août) et Bataille de Froeschwiller-Woerth, également appelée bataille de Reichshoffen (6 août): la France subit ses premières défaites
-Dès le 23 août 1870, Strasbourg essuie des bombardements-plus de 200 000 obus tombent sur la ville au cours du siège.La destruction de la bibliothèque et de ses 300 000 ouvrages hérités des collections du Gymnase Jean Sturm (XVIe siècle) et de l'historien Jean-Daniel Schoepflin (1694-1771) a un large retentissement au sein de la communauté des savants et des universitaires. Strasbourg se rend le 27 septembre 1870.
-Le Siège de Belfort (novembre 1870-février 1871) se poursuit jusqu'à l'armistice du 15 février 1871 et à la reddition de la place forte, le 18 février 1871, sur ordre du gouvernement de la Défense nationale, présidé par Louis Adolphe Thiers
-L'Alsace (hors arrondissement de Belfort qui restera français) et la Moselle sont annexées en deux temps. Le Traité préliminaire de paix du 26 février 1871 met fin aux combats entre la France et l'Allemagne. Le Traité de Francfort du 10 mai 1871 fixe les conditions de la paix.

  • 18 avril 1871: le comte Friedrich Alexander von Bismarck-Bohlen, gouverneur général d'Alsace-Lorraine, institue l'Obligation scolaire en Alsace.